Marissa Nadler fait partie de cette caste des artistes qui se transmettent leur savoir d'une génération à une autre. Membre d’une famille d’artistes, elle n'a pas eu à s’extirper de sa condition sociale, à naviguer à contre-courant de sa tradition familiale pour tracer son propre sillon. Mais le portrait n’en est pas pour autant aussi simple. Il ne suffit pas d’avoir baigné dans un tel univers pour s’en tirer à bon compte aussi facilement. On ne compte plus le nombre d’héritiers qui se sont cassés les dents à ce petit jeu. On peut néanmoins reconnaître que cela a un effet catalyseur. Cela facilite l’accession de celui qui est pourvu de talent et cela rend encore plus catastrophique le parcours de ceux qui n’en ont pas. Et il faut le dire Marissa Nadler fait partie de cette première catégorie.
Elle est avec ce septième album attendue comme le messie. Considérée à juste titre comme l’une des nouvelles représentantes de la scène country folk indépendante, elle a au fil de ses productions su installer son visage diaphane dans le paysage musical. Au point d’en abuser parfois. Mais à l’heure où les selfies sont érigés en modèle unique de communication personnelle, on ne peut pas vraiment l’en blâmer.
Ce qui est intéressant avec cette jeune génération c’est, et on l’a déjà évoqué avec Daughter, cette manière de recycler le passé sans le moindre complexe. Ce qui est fascinant, ce n’est pas cette voix impeccable qui évoque les fantômes de Joan Baez, Hope Sandoval et consorts. Non ce qui frappe, c’est cette manière de jouer avec certain poncif de la country notamment en plaçant cette guitare slide en écho à ces chœurs d’outre-tombe. C’est cette manière de réveiller les fantômes du passé pour mieux parfois en profaner la mémoire par petites touches. De donner à ce genre musical des allures de rêverie à la frontière du cauchemar. C’est cette manière de faire de la beauté avec de la mélancolie. Au point de se donner l’étiquette de folkeuse gothique. Ce qui, vous en conviendrez, n’est pas la panacée. Cela s’avère bien caricatural, voire catastrophique en termes de communication, si on entend ne pas limiter son auditoire à ceux que l'attente interminable du nouvel opus de Tokio Hotel rend orphelins. Dommage. Toutefois, il ne faut pas rester sur une étiquette, voire un malentendu, mais rester sur l’écoute d’un disque, qui ne révolutionne pas le genre, mais qui joue avec certains codes, au point de sortir de certains carcans. Un disque qui a de quoi sublimer ce début d’année rendu morose par la qualité moyenne de certaines sorties.