Dans une vague d’artistes indépendants de la trentaine ou quarantaine partageant une vision nouvelle des Etats-Unis (on pense à Alex G, L’Rain ou Yves Tumor), Youth Lagoon se présente comme un sensible poète à la voix cristalline et fragile, dont on compare notamment le style à celui d’Elliott Smith. Son dernier opus Heaven is a Junkyard (2023) était un concentré de sensibilité et d’émotions brutes (on vous conseille l’émouvant The Sling).
Depuis cette date, Trevor Powers s’est replongé dans ses souvenirs d’enfance restés dans son Idaho natal et a exhumé d’anciennes cassettes vidéo de famille datant des années 90 pour composer ce Rarely Do I Dream. Les titres de l’album se présentent ainsi comme de petites bandes originales de l’enfance de l’artiste (Parking Lot). Associées aux extraits audio des dites cassettes, les compositions de Rarely Do I Dream nous plongent par bribes dans la vie du jeune Powers et dans une certaine distorsion temporelle nous donnant l'impression de contempler tranquillement un vieil album photo. On finit alors par être happé au cœur même de ces histoires de famille, d’enfance et de vie (Home Movies 1989-1993).
La production de l’album est plus électrique et puissante, mais tout aussi orchestrale que celle du précédent album (Gumshoe (Dracula From Arkansas)). On y retrouve également des titres plus doux et aériens se basant sur de simples mélodies de piano et mettant en avant la voix de verre de Powers (Seersucker, My Beautiful Girl). Dans une ambiance chaleureuse et intime, Rarely Do I Dream fonctionne comme une madeleine de Proust, mélangeant mélancolie tendre et chaleur douce (Football). Ce témoignage de vie de Youth Lagoon nous met du baume au cœur, dans un contexte politique états-unien parfois anxiogène.