Un mois à peine après la sortie de son nouvel album,
Battlefield,
Ez3kiel battait la campagne pour une série de concerts. Petite escale dans la petite salle du
Fuzz’Yon à La Roche-sur-Yon pour leur septième date. Quoi de mieux pour ouvrir cette soirée de retrouvailles qu’un set de
Filastine, leur partenaire récemment signé sur le label
Jarring Effects. Un set de mélange ethnique, d’un univers métissé, comme un grand bordel de percussions, savamment orchestré par l’Américain. Les rythmiques font penser à une battucada, où l’artiste prend plaisir à taper sur tout ce qui traîne. Une derbouka qui accentue les influences orientales, mais aussi un caddie. Oui monsieur, un caddie amplifié sur lequel
Filastine s’amuse à poser ses baguettes. Chaque recoin de l’instrument métallique bricolé est utilisé, pour un effet vraiment entraînant. L’objet résonne parce qu’il est vide, comme un clin d’œil à l’ère de consommation de masse dans laquelle nous naviguons.

La basse profonde et le beat lourd structurent les morceaux alternant hip-hop, ragga et breakbeat. Par-dessus, se superposent une multitude de percussions qui viennent étoffer la rythmique. Le set est efficace, même si j’arrive un peu tard pour en parler objectivement. Quelques bouffées de nicotine dans le froid vendéen plus tard, les quatre membres d'
Ez3kiel débarquent, ouvrant le live par leur dernière création :
Battlefield. Heureux d’être sur scène, ils ont l’air de l’être. Yann Nguema (basse) a le sourire scotché au visage dès les premières notes même si l’on sent un peu de retenue. Pas pour longtemps, car Joan Guillon est déchaîné, enchanté de manier l’instrument, de gratter les cordes et plus seulement d’être aux machines.

On s’y attendait après l’écoute de
Battlefield, le son d’
Ez3kiel s’est durcit, assombrit. La basse et la guitare prennent des accents rock, amplifiés par les deux batteries installées sur scène. Rejoint par Stéphane Babiaud, le trio si perfectionniste n’a pas eu suffisamment le temps de préparer sa tournée. Pourtant les enchaînements se font parfaitement, et la magie d’
Ez3kiel opère. Le public est captivé, surpris quand les accords déchaînés de
Battlefield déchirent leurs oreilles, fragile organe que
Naphtaline avait apaisé. Appréhension. Comment le groupe va enchaîner les transitions entre pétage de plomb rock et comptine pour enfants ? Bien, très bien. La technique du « petit nouveau » y est peut-être pour quelque chose. Le multi-instrumentaliste alterne entre mélodies au vibraphone façon comptine pour enfants et expression de rage à la batterie. Parfaitement intégré, le garçon semble même mener ses associés. Derrière, les visuels font leur effet, projetés sur un immense écran, où l’univers d’
Ez3kiel prend vie.

Le groupe se permettra même de jouer
Firedamp, un interlude de breakcore (ou autre variante de métal que je ne connais pas) qui surprendra plus d’un spectateur. Petit sourire en coin des musiciens, apparemment contents d’avoir surpris tout le monde.
Volphoni aura sa revanche et l’univers de
Battlefield prendra vie, entrelacé des mélodies de
Naphtaline. Et déjà viendra la fin. Les artistes saluent, remercient et lancent un générique projeté sur l’écran comme à la fin d’un film au cinéma. Dans les salles obscures, la majorité des spectateurs aurait quitté la salle silencieusement, avant de se poser l’inévitable question «
Alors, t’as trouvé ça comment ? »

Tout le monde restera, implorant le quatuor de revenir. Ce qu’il fera avec brio, en plaçant un
Versus à l’image du concert : paradoxal. Navigant entre folie et apaisement le spectateur sortira quelques minutes plus tard. «
Alors t’as trouvé ça comment ? »