Jefre Cantu-Ledesma est un type bien. Après avoir tranquillement révolutionné le post-rock avec Tarentel, puis dépoussiéré le psych avec The Alps, on l'a vu en solo repousser les limites de la drone music avec un talent fou, sans jamais se laisser enfermer dans cette case.
Ses opus, chez Root Strata ou Type Records, dessinent les contours d'un post-shoegaze brumeux et romantique en diable, dont la langueur vénéneuse rappelle Tropic of Cancer ou même Grouper, avec qui il a d'ailleurs collaboré. Avec A Year With 13 Moons, le voilà qui débarque chez Mexican Summer, avec un son encore différent, qui réussit le pari d'être plus radical et plus accessible que ses oeuvres précédentes.
The Last Time I Saw Your Face annonce la couleur d'entrée : la brume est toujours là, mais traversée cette fois par des éclats pop et noise, une lumière colorée qui fleure bon la cold wave, avec pour résultat une mosaïque complexe, fragmentée, bien loin du drone froid de ses débuts.
Musique post-moderne, donc, qui fracasse ses structures et construit sur les ruines ; un territoire sonore déjà largement balisé par un certain Tim Hecker, mais sur lequel Ledesma parvient à faire germer un goût d'inédit : là où le canadien favorise une instrumentation classique, le californien se tourne plutôt vers un romantisme pop, à grand renfort de synthés 80's et de boites à rythme 90's.
Le mélange n'est pas nouveau, mais le dosage, inédit, fonctionne à merveille, tissant un univers à la fois familier et hostile, entre nostalgie hertzienne et électricité gothique. L'ambiance est à la contemplation, mais rarement apaisée : les morceaux, dépassant peu souvent la barre des trois minutes, ont un arrière-goût de rouille, succédanés d'une gloire passée enterrée sous la poussière.
En cela, plus qu'Oneohtrix Point Never, c'est William Basinski que A Year With 13 Moons rappelle, avec ses fantômes figés sur bande magnétique, à l'épreuve du temps. Jefre Cantu-Ledesma convoque ces souvenirs ténus, que l'on tente de raviver en se passant la cassette, encore et encore, sans jamais en retrouver le goût ; le chant du cygne d'un téléviseur cathodique n'a jamais si bien sonné.
Chroniqué par
Matthias Fuchs
le 10/03/2015
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