Né sur les cendres du quintet Bedhead, formation culte de la scène slowcore américaine des années 90, The New Year vient de livrer après neuf ans de silence un quatrième album dans la discrétion la plus totale. Il est bon de rappeler que la discrétion a toujours été l'une des principales caractéristiques des frères leaders Matt et Bubba Kadane, eux qui poursuivent naturellement leur route en faisant fi des modes éphémères ou des fausses ambitions qui pourraient pervertir leur authenticité musicale. Chez The New Year comme chez Bedhead avant eux, il s'agirait plutôt de faire l'éloge de la modestie, de l'approximation, de la pudeur et plus généralement de tout ce qui rend compte des failles humaines. Faire l'éloge de la sobriété aussi, cette dernière étant déjà présente sur ces pochettes monochromes garnissant toute leur discographie. Faire surtout l'éloge d'une intégrité artistique en pure autarcie qui rappelle parfois Shellac et sa ligne de conduite sans concession (cet album est d'ailleurs enregistré en partie par Steve Albini). Ainsi, The New Year s'est constamment attaché à l'idée de débarrasser son rock de toute pose et effet superflu pour finalement ne s'en tenir qu'à l'essentiel : écrire de bonnes chansons et les livrer dans leur plus simple appareil.
Avec Snow on retrouve intact tout le charme irriguant la musique des américains, les affres du temps ne semblant pas encore atteindre cet indie-rock se situant quelque part entre la lo-fi et le sadcore, ou plus vulgairement entre un Pavement sous prozac (l'excellente Mayday d'ouverture) et un Codeine revitalisé au berocca. Cependant, si avec Bedhead les frères Kadane défendaient dans leurs compositions une certaine molesse des matins difficiles avec la croûte aux coins des yeux, The New Year leur permet de s'ouvrir à plus de vigueur dans le rythme (Recent History et The Party's Over). Mais si le groupe se présente comme une version désengourdie de Bedhead, celui-ci a toutefois gardé de ses œuvres séminales un talent sans pareil pour nous faire oublier la complexité qui se joue au sein de ces chansons si chaleureuses. C'est certainement dans l'enlacement de ses guitares électriques et acoustiques que le groupe sait encore composer ses plus belles chansons : la sinueuse Homebody et la cristalline Amnesia (ci-dessous) pour ne citer que ces deux là. Avec Myths et The Beast, deux morceaux se faisant écho par leurs longs mouvements ascensionnels, le quator arrive également à épurer de façon drastique les schémas éculés du post-rock afin de donner au genre une seconde jeunesse. Les américains savent aussi apporter une légèreté presque enjouée à leurs petites lamentations comme en témoigne les synthés cotonneux de la berceuse Snow. Si dans l'inconscient collectif la neige renvoie souvent au froid hivernal, c'est bien à la chaleur d'un lit douillet au coin du feu que The New Year nous convie avec ce remarquable album-cocon si loin et si proche de nous.
Chroniqué par
Romain
le 01/07/2017