Depuis longtemps, je veux écrire quelques lignes sur
Jukebox. Je ne prendrais pas l'excuse du manque de temps, si facile à fournir dans notre quotidien empli de stress et de pollution sonore, engendrant une fatigue permanente, où l'on se surprend à dénigrer les émissions minables de la télévision plutôt que de l'éteindre. Pour éviter de m'abrutir devant les programmes d'un lundi férié, je décide de me réécouter la dernière création de
Cat Power. Je remercie le ciel d'être si gris et de lâcher quelques gouttes de pluie, qui accentuent la solitude dont j'ai besoin pour apprécier pleinement cette musique.
Avec
Jukebox, la belle
Chan Marshall s'essaie pour la seconde fois à l'exercice des reprises après
The covers records en 2000. La jeune femme entame par une version pluvieuse de
New York de
Sinatra. Courte et surprenante à la première écoute, mais finalement agréable avec le temps. Peut-être l'inverse de l'album d'ailleurs. Je craque personnellement pour
Metal Heart, où l'Américaine reprend un de ses propres titres avec une sensibilité déroutante. Les accords de piano caressent la voix, comme les larmes qui coulent sur mes joues.
Cat Power affiche une grande sérénité dans sa voix, apparemment jamais perturbée par la beauté de ses propres créations. On la sent intouchable, inaccessible et on tombe inévitablement sous le charme, même quand elle reprend les autres.
Lost someone, reprise de
James Brown, est plus personnelle, seul titre où la chanteuse semble complètement se laisser aller dans son interprétation.
Silver stallion se rapproche de l'univers acoustique de
Ben Harper dans sa version féminine. Seul titre inédit de l'album,
Song to Bobby est un hommage émouvant à
Bob Dylan, dont elle reprend d'ailleurs
I believe in you, rythmé par un piano magistral. Un piano qui vient sublimer
Don't explain chipée à
Billie Holiday.
Si la voix de
Cat Power est remarquable, son joli minois ne l'est pas moins. Une tonalité atypique, confortablement protégée par un superbe visage, qui permettrait à
Chan Marshall de réussir dans tous les domaines. La poupée folk américaine pourrait donc aisément se contenter de pondre des titres sans âme. A l'écoute de
Jukebox, on pourrait lui reprocher d'être tombée dans cette facilité. Impossible pourtant d'émettre de telles critiques, le choix des titres étant remarquable.
Chan Marshall semble avoir enregistré cet album sans prétention, se permettant simplement de reprendre des grands noms à sa manière, comme une exercice de traduction fidèle. Aucune ombre au tableau, juste une petite lassitude en cas d'écoute répétée.
Il pleut toujours. Je réécoute
Metal heart. Je m'en veux de dire un peu de mal. Oubliez tout ce que je viens d'écrire.
Chroniqué par
Camille
le 24/03/2008