Sur
Leyfdu Ljosinu, on a constamment la sensation que la musique s'élabore ou s'invente sous nos yeux, à mesure de sa lente et fébrile progression. C'est le miracle de cette pièce composée par la violoncelliste islandaise
Hildur Guðnadóttir, qui ne cesse de franchir des plateaux de plus en plus élevés pour nous faire entrevoir quelque chose d'un "au-delà" de la musique assez indéfinissable. Est-ce le silence, la disparition de la musique dans le rêve qu'elle a elle-même engendré?
Dans la répétition d'un motif qui se dédouble et se fait sans cesse écho - prière en toile d'araignée dessinée au violoncelle ou récitée par la jeune femme (ou les deux simultanément) - l'Islandaise ne conjure par simplement la fin de la musique, elle réaffirme la primauté de l'exploration et du mouvement perpétuel sur un monde définitivement réalisé, où toute chose aspire à l'immuabilité. C'est l'implacable force de la compositrice que d'esquisser ce parcours à la fois doloriste et vibrant, incertain et sidéral, où le pari est toujours fait de la métamorphose et de la transformation, plutôt que celui de la stase et de la mort.
De ce "parcours" qui éprouve la distance entre l'intime et l'infiniment grand, et prend la lumière et les ténèbres à leur jeu de séduction,
Hildur Guðnadóttir tire un chef d’œuvre de musique minimaliste, atteint le sommet de son art. Éblouissant.