Si l'on voit à peu près comment a débuté ce psychédélisme lo-fi et tranchant, lent et ténébreux - on en retrouve les traces vénéneuses chez
Siouxie Sioux,
Liz Frazer et dans une moindre mesure
Lisa Gerrard - on se demande encore comment on peut produire autant de neurasthénie.
Dernier oiseau mazouté sur ce fil néo-gothique où se sont récemment perchées les voix spleenétiques de
Corinne Brown (
Effi Briest) ou
Cameron Mesirow (
Glasser),
Nika Roza Danilova aka
Zola Jesus choisit à l'inverse de ces dernières, de faire simple. Visant un certain ascétisme sonique, tuant dans l’œuf toute velléité d'exubérance, elle pare sa voix - mise invariablement en avant sur chaque titre - des seuls effets de boîtes à rythmes et de claviers. Réduits à ce "simple" appareil, les morceaux ne donnent pourtant pas dans la facilité. Ici,
Zola Jesus ne la joue jamais petit bras, sublimant, par son chant magique, ce qui aurait pu aisément passer pour de gentilles révérences aux aînées .
Nika Roza est bien trop insoumise, trop aventureuse pour se contenter des prés carrés vertueux de la cold wave à mémé.
Alors,
Stridulum II peut de prime abord décevoir un brin, et apparaitre quelque peu léger, comme manquant de coffre . Ce n'est qu'une impression, née d'un mauvais réflexe. En effet, on se laisse trop souvent emporter par le goût de l'hypertexte. Ce besoin "geekesque" de mettre en parallèle tout et son contraire.
Si ce disque a des réminiscences gothiques remontant à la fin des années soixante dix, une chose reste sûre, c'est qu'au-delà des comparaisons à ces mythiques pythies, l'Américaine n'a rien à leur envier, abstraction faite tout de même de cet avantage indéniable d'avoir marqué durablement l'inconscient collectif. L'ancienneté quoi !
En fin de compte, ces neuf titres, sauvages et habités, affirment au fil des écoutes une certaine altérité, assumant leur singularité pour imposer une musique beaucoup plus sophistiquée, malade d'une mélancolie plus urbaine et froide que celle exprimée en son temps par ces écrasants modèles.
Un troisième opus qui confirme ce que déjà, à l'écoute de ses précédentes sorties,
New Amsterdam et le possédé
The Spoils, nous pressentions : la voilà la relève...
Zola Jesus une référence en devenir.
Chroniqué par
Yvan
le 06/04/2011