Premier album éponyme de
Bersarin Quartett. On ne sait pas grand chose de cet O.V.N.I sinon qu'il ne s'agit pas d'un quatuor mais d'un seul homme. Un mystérieux allemand, répondant au nom de Thomas. Mystérieux ? Oui, parce que le bougre débarque de nul part, et décide de donner du fil à retordre aux pauvres chroniqueurs qui, comme moi, cherchent désespérément un petit bout d'information à gratter sur Google. Alors, à quoi m'ont mené mes recherches, si ce n'est de savoir qu'il s'appelle Thomas et qu'il habite quelque part en Allemagne ? Et bien d'abord, je pense que ce mec est dégarni sur le devant de son crâne et qu'il porte des lunettes. Du moins, c'est ce que j'ai cru deviner de la seule photo que j'ai pu trouver de lui sur MySpace, aussi distincte pour tout avouer qu'un cliché pris d'un téléphone mobile à la résolution d'un timbre-poste, un soir sous un de ces réverbères en forme de boule orange. Je sais aussi que ça fait un moment que notre ami Thomas prépare sa galette. On trouve des traces de deux de ses titres (
St. Petersburg et
Es Kann Nicht Ewig Winter Sein) éparpillés à droite à gauche dans diverses compilations, la plus ancienne remontant à 2006. Au bas mot deux ans, donc, que
Bersarin Quartett squatte en gestation sous son réverbère orange.
Pour en venir à sa musique,
Bersarin Quartett se trouve quelque part entre l'ambient symphonique d'artistes comme
Murcof,
Julien Neto, ou
Hecq (pour son album
Night Falls) ; l'electro-jazz expérimental de
The Kilimanjaro Darkjazz Ensemble ; le nu-jazz de
The Cinematic Orchestra ; le post-rock ultra-planant d'
Hammock ; le modern classical de
Kronos Quartet ; voire même les travaux de
Clint Mansell. Ca fait beaucoup de choses, je vous l'accorde. J'espère que vous ne vous êtes pas mis en tête de ranger vos MP3 dans de petits dossiers classés par genre car celui-ci risque de pas mal vous emmerder. Seulement, je veux encore croire au bon sens de l'humanité ; croire que nous ne sommes qu'une infime poignée d'abrutis à s'être lancés dans de pareils projets et s'attarder dix minutes sur un album pour savoir si on le range plutôt là ou plutôt là.
Bersarin Quartett n'aurait pas dû s'appeler
Bersarin Quartett ; il aurait dû s'appeler Bersarin Orchester. C'est plus bateau, je le conçois, mais ce n'est pas quatre musiciens que j'entends ; c'est tout un ensemble. Il y a cinq ans, j'aurais mis ma main à couper que tout a été enregistré avec des musiciens en chair et en os. Quand on voit ce que l'on peut sortir aujourd'hui de logiciels comme Reason ou des plug-ins de Spectrasonics, on n'est plus sûr de rien. Il est indéniable en tout cas que l'acoustique des instruments est particulièrement réussie. A côté, ceux utilisés sur
My Downfall de
Venetian Snares ont un gout affreusement synthétique (payez lui un orchestre nom de Dieu !). A cette couche symphonique particulièrement savoureuse viennent parfois se blottir de petits glitch discrets du plus bel effet, parfois rien. Quelques rythmiques brossées par une batterie jazz ; quelques notes étalées sur un piano ou sur un synthé ; des guitares ; des échos de hautbois, de trompette et de saxo charmeur ; une basse aux rondeurs élégantes ; et bien sûr les cœurs de cordes, toujours omniprésents.
L'album de
Bersarin Quartett se déroule avec raffinement et intelligence. Nous ne sommes qu'au milieu de l'année, mais je pressens déjà qu'il sera pour moi le nouvel artiste le plus prometteur du cru 2008. Ne passez pas à côté de cet album ; vous pourriez bien rater une perle.
Chroniqué par
Tehanor
le 14/05/2008