De l’aveu même de ses membres, certains titres du premier album de
Natsat,
Angle, ne sont pas exactement des morceaux, mais plutôt des traces (
Horizon 1 et, dans sa seconde partie,
Columbo vs. horizon 5). Certes, chaque morceau de musique enregistrée est une trace de sa performance, mais il en est qui sont plus que cela. Ce sont des traces de moments de la vie de leurs auteurs, de ces jours passés à enregistrer la musique.
Comme par résonance, cet aspect de la musique de
Natsat envahit
Angle : musique atmosphérique qui se déploie le long d’une ligne au-delà de laquelle, cela semble certain, plus rien n’est possible. Une musique qui fait penser que l’urgence dans laquelle elle a été enregistrée, si elle n’est pas ce qui lui est arrivé de mieux, ne l’a cependant pas ruinée. Comme cette voix que l’on entend sur
Glaverbel et
Aberdeen H, elle se joue dans un après : après la colère et la rage peut-être, quoiqu’elles soient encore audibles — après que quelque chose s’est brisé, que l’on continue quand même, certain que rien n’est fini. Musique dont la gravité est le principal ressort (dominance des basses, voix grave à peine plus forte qu’un murmure), mais qui sait y échapper lorsque guitare saturée et cuivres s’entrelacent en un tissu sonore intense et mouvementé (
Dirty paradise).
Et puis, il y a ces trois titres qui, à mon sens, se détachent :
Great northern,
Sumo de Naja et
Mystery : trois ambiances différentes, trois registres complémentaires qui mettent en évidence la diversité de la musique de
Natsat : la gravité dont j’ai déjà parlée, mais aussi la capacité à faire résonner un groove authentique qui doit plus au jazz qu’au funk et la faculté de donner à ses morceaux une dimension sombre sans être étouffante puisque le groupe sait mobiliser toute la puissance nécessaire à un rock ample.
Une fois le disque passé, une envie le remplace, celle de pouvoir partager bientôt d’autres moments de la vie de
Natsat.
Chroniqué par
Jérôme Orsoni
le 04/04/2005