Lourde tâche de chroniquer un album de
Massive Attack, les vétérans du trip-hop sont sévèrement jugés, tout comme
Björk, leurs nouvelles sorties font l’objet de vives critiques et d’un profond désaccord entre les auditeurs, on ne compte plus le nombre de comparaisons entre aujourd’hui et leurs débuts. Dans le cas de
Danny the Dog, les commentaires éclataient bien avant la sortie de l'album : "faire la B.O. d’un film de la Luc Besson production... pitoyable" Après
Archive, c’est au tour de
Massive Attack de réaliser la B.O. d’un film produit par Luc Besson, certains diront : "commerce production", y a-t-il une honte à faire la B.O. d’un film orienté grand public ?
Alors... Réussite ou échec ?
Danny the Dog est un album instrumental, chose originale pour Massive qui avait fondé sa réputation sur ses multiples collaborations de choix. La présence murmurée par certains d’
Elisabeth Fraser se relève être pure fabulation. Le titre en duo avec
RZA ne figurent pas non plus dans la version finale...
Bien qu’on en ressente les traces, on est bien loin du
Massive Attack habituel, est-ce un atout ? L’ambiance âpre, les substances thébaïques, sont ici absentes des compositions, on trouve à leur place une orchestration bien différente, très rangée, très propre où seuls quelques rythmes à la
Prodigy viennent agiter le tout.
Danny the Dog offrait pourtant à
Massive Attack une nouvelle forme de composition: aucun refrain nécessaire, aucune parole exigée. Mais malgré quelques tentatives d’expérimentations, il reste au final beaucoup trop débarbouillé de l’asphalte de Bristol. Trop évident, trop cliché d'une B.O. C'est au final une B.O. à la
Serra... on est très loin de ce qu'on attendait!
Pourtant bon nombre de leurs titres ont déjà figuré sur des B.O. auparavant ("Sliver", "Pi", "Moulin Rouge", etc.) ayant même récemment écrit
I Against I en duo avec
Mos Def pour le film "Blade 2" (titre transitoire entre
Mezzanine et
100th Window), pourquoi avoir pondu des compositions qui brisent net leur univers sombre, opiacé et pondéreux.
Le génie du sombre
Mezzanine et du "hip-hoppeux"
Blue Lines est bien loin. Dur de faire abstraction de ces albums phares et la comparaison se fait inévitablement!
Danny the Dog est un disque fade où l'on semble retrouver diverses idées piochées ici et là: Forte impression que Prodigy a participé à l'album ( 3D serait-il nostagique de l’époque où il avait composé la B.O. du film
The Uranus Project avec Liam ? ). La majorité des compositions paraissent stériles, maîtrisées mais bâclées. Vague espoir sur le début de certains titres mais vite oublié face à l’inégalité de l'album. 3D a-t-il calmé sa colère juvénile, épuré son passé marginal et rangé les drogues ? Ses troubles compulsifs et de sa dépression constante l'ont-ils rongés? Il semblerait qu'à l'usage de Besson, puissant anxiolytique abrutissant, on perde toute sa hargne, toutes ses pulsions démentes pour finalement devenir anesthésié.
Massive Attack en douce capitulation compose armes baissées.
Ceux qui ne retiennent de Massive que leur premier album
Blue Lines resteront à tout jamais amers face aux nouveaux titres composés. Ceux qui considèrent Massive comme un groupe en évolution constante et qui aiment les musiques d'ambiances seront peut-être séduits. Dans tous les cas, le prochain album de
Massive Attack semble être le dernier espoir de mettre tout le monde d’accord sur le fait que
Mezzanine/ peut être surpassé, que le groupe a encore à apporter au monde de la musique,
a contrario l’échec d’un futur album pourrait les plonger dans les abysses sonores.
Chroniqué par
Peke
le 26/10/2004