Alors que le monde entier se languit du nouvel album (fantôme) de
Portishead, c'est sans prévenir et contre toute attente que sort
Out of Season, premier opus solo de la chanteuse
Beth Gibbons. Celle-ci nous dévoile une sensibilité attachante, à la fois douce et mélancolique. Mais pas de downtempo ici. Un travail très personnel, qui fait revivre le temps de dix diamants sonores, la soul des années 1960/70 et le folk/blues le plus pur.
Mysteries laisse rêveur. Voix fragile et tremblante, arpège de guitare simple et triste, choeurs féminins, plongent immédiatement l'auditeur dans une sensation de tristesse sublimée.
Tom the Model change totalement d'orientation. Ici, c'est la soul qui prime. Le fantôme de
Janis Joplin plâne au dessus du refrain accrocheur. Envolées lyriques des violons et retour des choeurs, donne tout son corps à cette chanson.
Show retombe dans la tristesse la plus froide. Une mélodie style piano-bar porte la voix ténébreuse et déchirante de
Beth Gibbons. D'une douleur infinie, se titre est un moment éprouvant si votre moral est bas. Mais quel titre...
Romance et
Sand River flirtent avec le jazz. Rythmes discrets, presque étouffés, chant sensuel et timide, contrebasse ronde et claviers scintillants.
Spider Monkey, qui suit, est sans doute le titre le plus marquant.
Beth Gibbons semble hésitante, un peu effrayée. L'atmosphère est résolument noir et prisonnier de sa propre introversion. Une mélodie glacée apparait subitement, lancinante, enfantine, maladive, teintée de cruautée complainsante. Une phrase de guitare à deux accords se pérpetue, hypnotique, tandis qu'une autre pousse de longues plaintes. Une basse lourde déboule de nul part, en soulevant le sol et les esprits. Puis tout s'achève. Ne demeure que cette mystérieuse mélodie, inquiètante et moqueuse, jusqu'au silence. Retour au folk sur
Resolve, courte chanson, fébrile et semblant accompagner le temps des regrets et de la nostalgie.
Drake fait immédiatement penser au défunt
Fairground Attraction. Contrebasse de rigueur, batterie jazzy jouée aux balais, et sonorités acoustiques. Les violons réapparaissent et une petite pensée pour
Glory Box traverse le cerveau, le temps d'une étincelle.
Funny Time of Year ressemble comme deux gouttes d'eau aux morceaux de début d'album tels que
Romance et
Sand River. Section rythmique très calme et dosée. Orgue Hammond et voix déchirante.
Rustin Man enfin est un morceau ambient, cette fois, sombre et hermétique. Le chant, à la limite du "spoken words", semble provenir d'un enregistrement vidéo, confèrant ainsi à ce titre-conclusion une ambiance intriguante et indéfinissable.
Si vous pensez que quarante minutes de mélancolie viscérale peuvent vous faire patienter, en attendant le nouveau
Portishead, jetez vous sur cet album. Si vous pensez que votre esprit n'est plus capable de s'émouvoir, jetez vous sur cet album. Personne ne peux rester indifferent. Alors pourquoi s'en priver ?
Chroniqué par
Yragael
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