Theon Cross

Theon Cross est un artiste incontournable de la nouvelle scène jazz de Londres constituée notamment de Kamaal Williams, Yussef Dayes, Binker Golding, Alfa Mist, KOKOROKO ou encore Shabaka Hutchking. Cette jeune génération issue des quartiers populaires de la capitale anglaise souhaite abolir les frontières du jazz pour dépeindre la vitalité et l'énergie de son quotidien. C'est à l'adolescence que le jeune Theon choisit le tuba, instrument trop souvent négligé dans le jazz, pour exprimer toute sa créativité. Au fil des années, l'artiste londonien a trouvé dans ce cuivre un compagnon de route idéal avec lequel il a joué pour de nombreux groupes et artistes (Sons of Kermet, Pharoahe Monch...). Sur son premier album solo Fyah (2019), il choisit de donner à son tuba la place qu'il mérite, c'est à dire au cœur de la scène.

Né et ayant grandi à Londres, Theon Cross y côtoie l’effervescence musicale de cette ville à travers le hip-hop, le reggae, la musique caribéenne et les clubs. Ça danse et ça groove dans un melting-pot mondial. C'est toute cette énergie qui est compressée dans le tube métallique de Theon et qui se retrouve extirpée à chaque note de son premier album. Et pour mieux nous montrer l'esprit collectif qui anime cette nouvelle scène, il est accompagné à la batterie par son ami d'enfance Moses Boyd, et du saxo de Nubya Garcia, qu'il a rencontré au sein du Tommorow's Warrior, lieu central du Jazz londonien actuel.

Au cours de ces 45 minutes, ces trois compagnons nous embarquent dans une ballade festive au milieu de leur ville-monde. Car à peine avons nous atterri à Heathrow, que Theon Cross et ses amis nous entrainent au milieu de la foule du carnaval de Notting Hill en plein après-midi (Activate). Transpirants et déboussolés, on réussit malgré tout à nous échapper de la masse pour reprendre notre souffle en terrasse. Avec une pinte de IPA à la main, on regarde les rues de la capitale poursuivre leur bouillonnante fin de journée (The Offerings). Les verres s'enchainent, tout comme les anecdotes et les histoires de chacun, provocant parfois un certain ennui (Radiation). C'est dans cet écume de bières et de mots, que le soleil et les passants déclinent, tandis que les minutes et nos silences s'allongent (Letting Go). On se dit qu'il est peut-être temps de déposer nos sacs à l'hôtel. Mais Londres est une ville où on ne dort jamais. Alors Theon nous amène dans une "party" en sous-sol. Il est 19h, la salle est remplie de caribéens, d'anglais, de gens de tous âges, animés par la force invisible de leur mégalopole.

Ils dansent dans une frénésie collective et contagieuse (Candace of Meroe). La nuit s'étoffe dans ce lieu et Nubya et Moses nous rejoignent (Panda Village). On a chaud et nos corps bougent encore pendant des heures. Ce n'est que lorsque la dernière note de saxo retentit qu'on se décide de rentrer. On prend alors le bus impérial direction Hyde Park. Le jour se lève. Nos muscles et nos cerveaux sont encore engourdis par ces dernières 24h. C'est la fin du voyage, on le sait, et on se laisse bercer par les rues vides de la capitale anglaise pour mieux savourer ces derniers instants (CIYA). De retour à la maison, on repense à ce voyage, un léger sourire au coin des lèvres. On se dit que ces joyeux lurons, portés par un Theon Cross déchainé, ont réussi à nous transmettre leur message : l'énergie de Londres survivra, quoiqu'il arrive, poussée par les notes cuivrées d'une génération pleine d'audace.