Sur leur premier album, Love, le duo portugais Yong Yong dessinait les contours d'une musique nocturne et foutraque, aux relents éthyliques mais festifs, qui les désignait comme dignes héritiers du feu duo Hype Williams.
Avec Greatest It's, ils changent de cap et gagnent en maturité : la nuit fait place au crépuscule, l'errance sonore à l'émerveillement. L'esthétique DIY est toujours présente, mais elle sert ici une composition Ô combien plus concise, souvent mélancolique, d'une incroyable beauté.
D'obédience électronique, la musique de Yong Yong brasse large et empile les influences sans la moindre retenue. Rythmiques world, basses techno, synthés ambient, samples hallucinés s'y côtoient avec une inventivité folle et pourtant, jamais cet amas musical ne semble manquer de cohérence ou de stabilité.
Les morceaux sont réduis à l'essentiel, quelques pistes hétéroclites mélangés avec talent, dont la cohabitation dégage une nostalgie simple et envoûtante. Le duo n'est pas dans la démonstration : ici, la forme sublime le fond, le fond légitime la forme.
New Castle et son mixage hasardeux en forme de chant du cygne, A Catia et son combo guitare/synthé sur lequel vient tituber une voix féminine si bizarrement samplée qu'elle nous émeut, Maca Lu-Lu et son chant primitif inopiné, viscéral... Yong Yong créé une musique électronique gauche, spontanée, telle qu'on l'a rarement entendu.
On peut bien sûr chercher des références, elles ne manquent pas : Demdike Stare, Lee Gamble, Andy Stott, Boards of Canada, Rene Hell, Donatto Dozzy, Clams Casino... Pourtant, Greatest It's ne sonne comme aucun autre, il semble le fruit de nombreuses années d'expérimentation, alors qu'à peine plus d'un an le sépare de son prédécesseur.
Greatest It's est d'une simplicité désarmante, d'une intensité rare. Il place en Yong Yong nos plus hauts espoirs, et devrait leur assurer une place d'honneur parmi les grandes découvertes de 2014.
Chroniqué par
Matthias Fuchs
le 27/01/2014