Quand on est une jeune chanteuse il est difficile de se faire un nom, encore plus de s’extirper du poids du passé. En effet comment éviter la comparaison avec ces références que sont PJ Harvey, Debbie Harry, Janis Joplin, Kate Bush, Siouxsie, Cat Power, Shannon Wright ou Fiona Apple ?
Pourquoi de telles considérations à l’écoute du premier album de cette Anglaise d’origine pakistanaise et norvégienne ? Tout simplement parce qu’il existe plus qu’une filiation à l’écoute de cet album entre Nadine Shah et certaine d’entre elles. D’ailleurs, on finit par parler de filiation à tout va. Depuis le début des années 90 et la sortie de son album Dry, PJ Harvey fut élevée au grade de monument au point d’alimenter le moindre name dropping censé étoffer la critique de l’album d’une jeune chanteuse comme Nadine Shah. Au point parfois d’en friser le ridicule, lorsqu’il a été question d’associer l’auteur de To Bring You My Love à la blonde Anna Calvi, qui n’a pas grand chose à voir avec la référence précitée.
Bref, cet héritage qui marque le travail de Nadine Shah ne consiste surement pas en une répétition servile de l’œuvre de ses aïeules. Au contraire, Nadine Shah a malgré son jeune âge, déjà digéré cet héritage avec un premier album sans fautes. Elle s’offre le luxe de mélanger les sonorités âpres d’une guitare arrangée à celle d’un piano hypnotique. Un coup de maître, disons le, car ce Love Your Dum and Mad a une classe folle. Une profondeur et une gravité qui révèlent le charisme d’une diva de l’étrange qui a su associer constructions efficaces et ambiances magnétiques.
L’écoute de la version de Cry me River enregistrée dans une église de Brighton en est une preuve des plus flagrantes. On pense aux chanteuses précitées mais aussi à l’étrangeté de l’œuvre de Swell, par cette manière de frôler parfois avec le folk alternatif (Floating). Bon nombre de chanteuses trop vite adoubées par la presse musicale ne peuvent arguer d’un album aussi réussi. Avec ce disque Nadine Shah signe l'une des plus belles entrées en matière de cette année 2013.