Les disques de
Stephan Kozalla aka
Dj Koze ont toujours été un sac de nœuds où s'entrelacent ses histoires de cœur avec la musique : hip-hop, house, ambient, downtempo, tout s'y emmêle. Une musique hybride et plurielle donc , qui parle aux sens sans être un puzzle inerte ni un instantané de synthèse, mais bel et bien une vue panoramique en mouvement perpétuel des goûts et des couleurs qui squattent le cerveau agité de ce producteur.
La preuve une nouvelle fois avec ce fulgurant
Amygdala, ses treize morceaux, et pratiquement autant de voix différentes conviées sur ces derniers. La nouveauté chez Kozalla. Et un supplément d'âme indéniable pour un disque qui n'en manquait absolument pas.
Une antienne populaire prétend que celui qui a atteint les sommets les plus élevés ne pourra jamais que redescendre. Koze en prend ici le contrepied. Lui, le Dj confirmé, le patron de label comblé (
Pampa Rds c'est son bébé d'avec
Markus Fink), s'installe un bivouac des plus cossus sur les hauts plateaux de l'électro. Un "club-house" grandiose fait de bric et de broc bien baroques où s'invitent les ami(e)s (qu'il s'agisse de son prof de yoga et sa femme ou de
Dan "Caribou" Snaith ,
Ada et
Matthew Dear ou encore
Sasha "Apparat" Ring) pour pousser la chansonnette autour d'un feu de joie housey multicolore (à l'instar de cet artwork complètement farfelu!). Pour le dire simplement, à l'écoute de ce deuxième lp de l'Allemand, on a terriblement envie de hurler
Banzaï !!, de plonger à corps perdu dans ce flot de sonorités organiques et sensuelles : d énormes vagues d une house hybride, dense et opulente. Le genre de musique qui n'existe que dans les têtes les plus folles.
Effectivement, tout n'y est que détails, rebondissements, astuces et dédicaces. Écoutez ce
Ich Schreib'Dir Ein Buch, fusion excentrique d'un passage du musical US
"Pal Joey" écrit en 1940 par l'immense duo Rodgers & Hart et d'un hit Motown
"Ain't No Mountain High Enough" (encore nos histoires de haut sommet !). Un morceau hirsute et dissonant qui malgré tout rend hommage notamment à la voix très théâtrale de la toute aussi légendaire et sulfureuse actrice allemande Hildegard Knef (la plus grande avec Marlène Dietrich). Un titre qui montre toute la folie et le coeur de Kozalla.
Si le doute persistait, penchez vous donc sur cette reprise teintée d'un R'n'B classieux du sublime
Homesick des
Kings Of Convenience porté là par la voix caractéristique de la Djette de Cologne,
Ada ou vers cette berceuse bancale
Das Wort où la voix de
Dirk von Lowtzow (
Phantom/Ghost) côtoie les samples de Marvin Gaye feulant un
"We’re all sensitive people, with so much to give" . Une phrase de notre producteur n'aura aucun mal à faire sienne tant son travail transpire la générosité.
Globalement, en collant son oreille tout contre
Amygdala, on peut capter les résonances d'une réalité qui nous parait furtive et quelque peu magnifiée, mais qui n'est finalement rien d'autre que le quotidien d'un artiste habité et talentueux.
Qui ne prendra pas le temps d'écouter ces échos risque de passer à côté, d'une part d'une belle expérience. Et d'autre part, d'un drôle de zigue : un gars audacieux et généreux, véritablement unique en son genre. Oui,
Dj Koze est de cette engeance là. Tout comme ce disque affolant !
Chroniqué par
Yvan
le 24/04/2013