L’iconoclaste
Taylor Deupree s’est joint au sound designer berlinois
Stephan Mathieu pour accoucher d’un recueil d’ambient music, paru tout récemment chez les japonais de
Spekk.
Transcriptions joue avec les supports et les époques, exercice dont
Stephan Mathieu est à vrai dire coutumier. L’allemand, en grand fanatique de oldies en tout genre, collectionne depuis toujours vieux phonographes et enregistrements préhistoriques, la plupart datant de la fin 19eme, début 20eme. Tel un alchimiste, il retravaille et manipule à l’infini le son issu de ces antiquités d’un autre âge, afin d’en dévoiler l’essence perdue.
Sur
Transcriptions,
Stephan Mathieu poursuit ce travail de restaurateur/bidouilleur, mais confie à
Taylor Deupree la tâche ardue d’amener ces ébauches de composition à leur terme, en y ajoutant quelques instrumentations electro-acoustiques. La présence de l’américain, qui pourrait paraître parfaitement anecdotique, s’avère en réalité primordiale. Elle ne clôt pas seulement ce dialogue à sens unique avec
Mathieu – ce qui aurait pu se révéler frustrant – mais se fait l’artisan de leur symbiose. Une symbiose sans laquelle la magie n'aurait pu opérer.
Tout ici est affaire de textures flottantes et de climats vaporeux. Chacun des huit fragments de
Transcriptions est magnifié par le song-writing précis de
Deupree. A grand renfort de nappes de guitare et d’arrangements au piano, celui-ci met savamment en valeur les enregistrements de
Mathieu, ces voix spectrales et fragiles, au grain si particulier, qui balayent le fond sonore et font parfois surface comme de vieux démons oubliés.
On sait néanmoins l’exercice de la collaboration difficile. Réunir deux cracs ne suffit pas, si l’audace de chacun se perd dans le compromis. C’est là la limite d’une telle expérience.
Mathieu et
Deupree ont beau en avoir sous la semelle, leur savoir faire a beau être irréprochable, les compositions de
Transcriptions se trouvent parfois bridées. A côté de perles ultra léchées mais peut-être difficiles d’accès (
Nocturne,
Solitude,
Solitude of Sphere), on trouve d'autres pièces plus efficaces mais malheureusement un peu convenues (passage obligé d’une telle association ?).
White heaven en est le parfait exemple.