Depuis la fin du siècle dernier,
Rjyan Kidwell, l'homme qui se cache derrière
Cex, arpente la scène musicale de Baltimore y affirmant toujours un peu plus un style des plus singuliers.
Parti faire de l'IDM au début des années 2000 (son album
Role Model signé sur
Tigerbeat6 aura son succès d'estime), il passera par la case hip-hop, créant juste sa musique comme véhicule à des voix rap, la sienne essentiellement (les albums
Tall, Dark and Handcuffed ou plus tard
Actual Fucking en atteste). On le retrouve aujourd'hui à la croisée des chemins avec
Bataille Royale (8 titres sortis en double 12" sur le label
Must Finish et en format digital sur
Tigerbeat6 avec un titre bonus).
Ce qui frappe ici en premier lieu c'est l'effort fait - assez appuyé dirons-nous - d'intégrer dans cette musique protéiforme, redevenue pour le coup quasi instrumentale, les sons inhérents à tous ces genres explorés ces dix dernières années.
Glitch, breakbeat, boucles hypnotiques, nombres d'effets sont mis en jeu avec cette prédominance des sonorités typées "Bmore Club", sorte d'hybridation de beat hip-hop et de house music qui fit les beaux jours des clubs de Baltimore. Mais quand
Cex pioche dans ces influences et ses expériences passées, c'est pour nourrir son inspiration du jour. Chacune d'elles sert de fil conducteur à de plus osées élucubrations soniques (la palme de ces expérimentations revenant à
Brains Out, véritable objet sonore de synthèse foncièrement enragé).
Les rythmes hip-hop se font déviants, quasi mécaniques par endroit (l'excellent
Roland Park Acid), la house perd en humidité, s'assèche même (
Latz Gasp), les accidents de laptop deviennent aqueux, acides autant que psychédéliques (l'effarant enchaînement des deux plages finales de chaque vinyl,
991 et
The Filth One).
Tout ceci n'empêchant pas des résurgences plus marquées où le groove reprend ses droits historiques, redevient lui-même, son vice à nouveau en étendard (les courbes de
Freq, une voix empoisonnée et lubrique tournant sur une rythmique des plus roboratives). Sa simplicité comme seul relief (le très naïf et peut-être moins réussi
1i).
Une heure de trip en fin de compte (abstraction faite du morceau bonus
Criticality, effluve digitale de dix-huit minutes pas du meilleur goût), perdu dans les méandres du cortex de
Cex. Un cerveau glouton aux capacités d'absorption remarquables.
Plus qu'une somme d'influences, ce
Bataille Royale en est la preuve concrète. Du bel ouvrage.
Chroniqué par
Yvan
le 10/08/2009