Cette grande famille que l'on désigne communément sous le nom d'IDM a vu ces dernières années bourgeonner quelques pouces mettant à l'honneur le piano. Suivant la voie tracée par
Aphex Twin avec son génialissime
Drukqs, c'est tout un pan du courant qui a su utiliser à bon escient cet instrument, lui faisant assumer la ligne mélodique tout en reléguant aux synthés le rôle d'ambianceurs d'arrière plan :
Port Blue,
Boy Is Fiction,
The Flashbulb ou encore
Kattoo.
Derrière
Subheim se cache Kotas K, fondateur, avec
Katja, du collectif grec SpectraLiquid. Katja est la chanteuse qui pose sa délicieuse voix sur
Howl ou
Voces Perdidas. Ce premier essai de
Subheim est d'une grande poésie. D'ailleurs, Kotas K lui-même ne tarit pas de métaphores lorsqu'il s'agit de présenter son album : sentiments intérieurs et leurs cris de désespoir, villes, ciels, âmes solitaires sur les toits, la laideur urbaine qui a bloqué notre regard vers l'infini, et j'en passe... Pour son petit cocktail de mélancolie,
Subheim propose une formule mélangeant donc ce fameux piano, les plages d'un synthétiseur, les violons, et les rythmiques glitchées comme le veut la coutume. L'apport de
Katja est tout à fait appréciable dans le sens où les collaborations avec une chanteuse se font plutôt rares – inexistantes ? – pour cette branche de l'IDM. Il participe, avec les violons et le piano, de cette acoustique devenue une qualité au sein de cette scène. En fait, c'est comme si "l'Intelligent Dance Music" avait trop longtemps usé et abusé des possibilités offertes par l'électronique, et qu'elle se rendait aujourd'hui compte de la valeur que peuvent prendre de véritables instruments lorsqu'ils sont adroitement soulignés par la synthèse expérimentale. Un nouveau souffle puisant son inspiration dans une sorte de retour aux sources.
Au delà de la marque de bon goût,
Subheim sait pondre ces petites mélodies qui nous touchent en bien peu de choses. Les violons s'accordent en symbiose avec les cœurs de synthé. On peut aussi sentir un travail notable dans les réverbérations et la façon dont les sons se déploient dans le champ stéréophonique. La musique de
Subheim est d'une somptuosité remarquable. Sa sauce se déverse onctueusement dans nos oreilles et on peut difficilement rester insensible à l'émotion dégagée de chaque pièce. Kotas K est un homme de talent, et sa galette est pour un premier essai une parfaite réussite. La conjoncture actuelle n'étant pas particulièrement favorable à l'IDM – qui pleure encore la mort du projet
Kattoo il y a quelques mois, ou celle presque annoncée par le boss du label Alphabasic pour la sortie du dernier
The Flashbulb – espérons à Kotas K que son projet
Subheim, et plus généralement son collectif SpectraLiquid, arrive à faire son bonhomme de chemin. L'IDM grec est entre de bonnes mains.
Chroniqué par
Tehanor
le 19/05/2008