Quelle merveilleuse idée que fut cette compilation diffusée gratuitement par
Cock Rock Disco il y a presque deux ans de ça. Grâce à elle, mes petites oreilles s'ouvraient aux folies breakcoriennes de
Drumcorps, et surtout, à cette tuerie d'
Elephants, premier tube de nos dénommés
Food For Animals. Si
Drumcorps a déjà été passé au crible par votre dévoué serviteur,
Food For Animals restait quant à lui au placard. Pour cause,
Scavengers, leur premier album, datait déjà de 2004 - un peu passé d'actualité, comme qu'on dirait. Je ne cessai pour autant de me surprendre en train d'agiter vindicativement le doigt, de reprendre, le coeur bondissant,
"When i say fuck you, i really mean fuck Georges Bush". C'était clair,
Food For Animals devait avoir sa petite place au rayon électro de dMute, sa petite chronique et sa petite photo où l'on pourrait bien distinguer l'éminence de la barbe de son chanteur (maintenant en binôme avec
Hy) car il est évident que les rappeurs barbus sont toujours quelques poils plus alternatifs que leurs collègues imberbes.
L'occasion de ressortir la "bouffe pour animaux" arrivée en 2007, avec la sortie de
Belly dont je quémande la pochette chez
Cock Rock Disco. Malheureusement, son boss semble bien trop occupé à secouer les fesses et suer des bras dans son
Jason Forrest Band pour daigner me répondre. Retour au placard ; je continue d'agiter bêtement la main devant mon PC tel un papi italien philosophant sous l'emprise de la caféine. Ce n'est qu'en cette fin d'année 2007 que, par miracle, surfant - tout à fait hasardeusement, il va de soi - sur un site pirate, me trouvai-je nez à nez avec cette satanée pochette. Fin du parcours du combattant. Je pouvais reposer les bras sur mon clavier et laisser
Jason Forrest suer des siens.
Pour bien vous figurer la musique de
Food For Animals, prenez ce qu'ont fait
Domotic à la pop, et appliquez-le au hip-hop. Ca ne vous parle pas ? Imaginez
dDamage qui aurait abandonné son synthé Fisher-Price et fait l'effort de masteriser correctement son skeud ; peut-être vous approcherez-vous du son qui caractérise
Food For Animals. Ca triture à mort ; ça rafle la gueule aux samples ; ça a un côté crado qui ressort malgré tout extrêmement bien des baffles ; les animaux sont des porchios mais ont le poil qui luit.
Alors, tout ça serait d'un mortel ennui si le flow des deux compères (
Vulture V et
Hy) ne nous foutait pas une bonne petite claque au passage.
Food for Animals se rapproche assez de
Dälek dans cette tentative de rapper sur fond de noise, mais l'approche est radicalement différente :
Dälek déprime,
Food For Animals déclame. Peut-être est-on en train d'assister, après la vague abstract, à la naissance d'un hip-hop d'un nouveau genre ? Ou peut-être tout ça ne se résumera jamais qu'à quelques illuminés ayant décidé de bousculer les conventions, histoire de montrer qu'on peut aussi écrire "courgette" avec des magnets de frigo P'tit Gervais.
Quoiqu'il en soit,
Food For Animals mérite toute notre attention. Non seulement parce que ces types ont du talent, mais aussi parce qu'il ont su en faire quelque chose d'audacieux : corrompre le beat, pourtant primordial pour le hip-hop, dans une bouillie parfois si infâme qu'il ne ressemble plus à rien (
Belly Kids). Sacrilège. Même
Dälek, qui ne fut pourtant pas très doux sur
Absence, n'avait osé s'attaquer à ce pilier du rap. Vous n'avez plus qu'à ranger vos croquettes bio, faire péter le steak de cheval aux hormones et arracher la mousse des enceintes avec les dents.
Chroniqué par
Tehanor
le 07/12/2007