Les Daft Punk doivent être envahis par un profond sentiment d'in-Justice. Peut-être même ont-ils griffonné dans les marges de leurs cahiers "Je te hais, public" en roulant des yeux derrière le verre fumé de leur casque
Spielvan. Il faut dire que l'accueil réservé à
Human after all fut plutôt glacial. La plupart des morceaux étaient en effet mal calibrés : trop longs, trop courts, ou simplement ennuyeux. Mais on se dit néanmoins avec le recul que le duo était au moins parvenu à jeter les bases d'un nouveau son. Mal comprise à l'époque, un peu hésitante sans doute, la fusion rock-electro (sur la rive electro) jetait à tous vents des riffs d'instruments indéfinissables (Fender ? Nordlead ?), des fuzzs crissants, des distos bouffies et surtout des salves de syncopes. Mais pourquoi donc de l'amertume chez le célèbre duo ?
Tout simplement parce que personne n'a relevé à ce moment la nouveauté du son - ou si peu - et que la même recette, mieux exécutée et plus assurée, triomphe une petite année plus tard avec
Justice et s'illustre de façon plus confidentielle avec
Teenage Bad Girl.
Signés sur Citizen Records, les deux français de TBG ont un passé rock et une solide culture electro qu'ils réunissent avec un talent presque constant. Passons toutefois sur les deux premières pistes de l'album,
Cocotte et
USB dick, à travers lesquelles les TBG déploient une énergie considérable à rendre un hommage peu gracieux aux Daft cités plus haut, tout en faisant fumer leur pédale d’overdrive. Le reste de l'album est néanmoins de grande qualité bien qu’il subsiste çà-et-là quelques mesures de vocoder parfaitement dispensables (celle de
Hands of a stranger est d’une banalité à hurler, celle d’
Aviateur tout simplement ridicule). Au rang des réussites, citons le génial (à l’exception du titre)
Fuckin’Frog : un morceau foisonnant, inventif, débordant de surprises. Suit
Break out the wheel, qui évoque les Boards of Canada parachutés dans un film de zombies mexicain. Une mention particulière à
Ghost house, enfin, qui offre une plage de deep-house entre deux déferlantes de distorsion. Pour le reste, les
Teenage bad girl, malgré quelques lâchers de barre, creusent avec un bonheur indéniable le sillon d’une electro astucieuse et volatile, diablement moderne.
Chroniqué par
Hayaji
le 09/07/2007