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Carla Bozulich

: Evangelista



sortie : 2006
label : Constellation
style : Post-rock / expérimental

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Tracklist :
1/ Evangelista I
2/ Steal Away
3/ How To Survive Being Hit By LIghtning
4/ Inside Sleeps
5/ Baby, That’s The Creeps
6/ Pissing
7/ Prince Of The World
8/ Nels’ Box
9/ Evangelista II

Cette année, le label Constellation ne faillit pas à sa réputation de parier sur des disques « organiques », « biologiques », bref, sur le post-rock à l’état pur. Pour la première fois, il accompagne Carla Bozulich dans la mise au monde de son nouvel opus solo – à la fois surprenante et authentique expression de sa sincérité artistique, Evangelista... Un aperçu de cet univers – un infini en 9 titres.

Dès le départ, on entre comme dans une grande maison dans la pénombre. Un univers ample, plein d’énergie, et informe, dû à l’absence de rythmique conventionnelle. Une sorte de respiration s’impose, d’autant plus réaliste qu’elle est spontanée et imprévisible, engendrée par les instruments, les « bruits » instrumentaux plus exactement, et les samples. Cet ensemble en équilibre dynamique ouvre un chemin à quelque chose qu’on attend comme un guide : la Voix. Les instruments semblent appuyer comme des gestes passionnés ses accents, oscillant entre murmure et cri trépignant, pour atteindre le niveau tribal des incantations mystiques. Dès la première piste, c’est comme si la musique se faisait étreinte.
Au cours des autres pistes, on constate la « cruauté » de l’enregistrement, qui va jusqu’à retravailler et amplifier les « feedbacks », ce qui permet de rendre cette musique encore plus touchante, voire accablante de sincérité. Le rythme est celui du flux, des battements de cœur, des secousses organiques, des gémissements, parfois… Cette organicité est magistralement atteinte par une utilisation novatrice des instruments et des bruits, même les plus « machiniques », fondant en une seule dimension des sonorités vintage et une modernité dans le traitement de la musique, en tant qu’ensemble infiniment extensible de sons à faire s’organiser selon son monde… Avec une voix qui se libère enfin d’un spectre de timbres qu’il faudrait définir comme étant du chant, et qui s’émancipe dans le monde de tous les sons possibles qui EXPRIMENT des mondes entiers de nous.

La sensation auditive se fait frisson de solitude, et en même temps respiration d’une sorte de plénitude. La plénitude qu’on a quand on prend conscience d’être plongé dans un MONDE, dans une marmite bouillonnante d’extérieur… Quelque chose qui a brûlé Carla Bozulich jusqu’à l’effroi résonnant, devant cette continuité, cette permanence de ce tout autour. C’est comme marcher dans un bout de monde, de nature ou de ville agité, et tout d’un coup… On s’arrête devant quelque chose de très cohérent, qui commence là devant nous, porté par cette voix d’une puissance mêlée d’authenticité fragile… La certitude de la solitude, certitude qui n’atteint sa pleine forme que quand on la communique – par l’art. Ce Spectacle très présent finit par se fondre dans une sorte de tournis de capharnaüm… qui devient tellement prégnant, tellement saisissable qu’on est au bord de l’insupportable. Pour mieux apprécier l’apaisement de la fin, qui est fébrile et presque faux, parce qu’on sait, on a vu déjà. Trop tard désormais. On ne pourra plus rester indifférent à ce souvenir. On est alors mené à une douce ascension, suggérée par les arpèges aigus d’une guitare, dont on savoure le son chaud et l’enregistrement très vintage. Mais on a déjà écouté d’autres chansons, on craint presque que cela change. Et on apprécie la justesse de l’artiste, qui maintient cette ascension sur les deux minutes de la chanson. C’est comme si dans l’imprécision d’une nuit où des hommes s’agitent, commençait à se profiler le feu timide d’un rassemblement nomade, au milieu duquel une voix fragile mais qui a la sagesse et la respectabilité de l’émotion authentique et brute, se déploie, posant un équilibre et donnant un but aux instruments un peu désœuvrés et errant anarchiquement dans le désert de l’expression, leur donnant une raison de pousser plus avant leur présence. Et c’est comme si la musique ordonnait qu’on se rallie à elle, dans une religieuse et tribale attention. Evangelista II clôt l’album, la voix et la parole y sont prédominants, comme si l’artiste nous invitait à prendre le parti que tout se résout par le verbe…

Carla Bozulich nous initie ici à une nouvelle forme de « corporalisation » de la musique… Cet album constitue une tentative magistrale, et en même temps une investigation mystique du plus haut point, qui permet peut- être cette réconciliation entre musique acorporelle et corporalité de son ressenti.


Chroniqué par Lou
le 16/05/2006

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