Délaissant un temps sa pieuvre multi-instrumentiste
Jaga Jazzist pour signer chez
Rune Grammofon et s’associer au batteur et vibraphoniste
Morten Olsen, le guitariste
Anders Hana, précoce s’il en est, choisit de s’aventurer en terres plus difficiles : plus bruitistes et moins mélodiques que son collectif de
Ninja Tune.
Et aussi anguleux, décharné, violent, rugueux. La batterie, d’abord, donne la trame rythmique de ces morceaux qui ne consistent pratiquement qu’en rythmes malmenés et brutalisés. Enchaînant dans le chaos figures et motifs, roulements et breaks, mesures paires et impaires, flottantes ou pulsées, elle a tôt fait d’égarer l’auditeur à l’intérieur de sa force de frappe.
Au-dessus et à l’intérieur, comme un souffle qui distendrait de toute part cette texture en patchwork, une guitare saturée indomptable, jouant du larsen avec parcimonie mais de la dissonance avec abondance, s’organisant en larges coulées distordues ou en notes courtes et stridentes, en grain et en timbres divers ou en notules télescopiques.
Leur déjà longue expérience et leurs multiples collaborations (
Fred Frith,
Axel Dörner, le
Thomas Dybdahl Band,
Arve Henriksen,
Dr. Didi Bruckmayr,
Garth Know,
Frank Gratkowsky,
Michael Moore et
Steve Lacy pour
Morten Olsen ;
Noxagt,
Ultralyd encore, et l’
Ingebrigt Flaten Quintet pour
Anders Hana) dotent les deux compères d’une maîtrise, d’une sûreté de jeu, de décision et de dialogue enthousiasmante : privilégiant un son analogique brut, enregistré dans le studio Athletic Sound qui a vu passer
Supersilent et le
Scorch Trio, chaque morceau est enregistré en live, sans overdub. Conditions de productions ou principe d’écriture et d’enregistrement qui dictent nécessairement son ton et sa voix à ce disque : offensif, abrasif et hautement dynamique. Ce qui n’empêche pas cet album de manquer par endroit de maturité eu égard à l’aboutissement coutumier des disques
Rune Grammofon, petite défaillance rattrapée par la vitalité querelleuse de ce
Raus Aus Stavangar.
Chroniqué par
Mathias
le 31/03/2006