Caché derrière un pseudonyme loufoque qui fleure bon les incantations rythmiques et les processions carnavalesques,
Christian Dergarabedian a à cœur, plus que tout, de déguiser sa musique. Ou plutôt, de la faire passer à la vitesse du son d’un costume à l’autre, comme si, pour enfin devenir amusante, pour enfin assurer l’auditeur d’un plaisir véritable, la musique électro-acoustique avait choisi de tout travestir en elle, jusqu’à perdre au fond d’une spirale d’oripeaux colorés ce qui fait son identité – jusqu’à dire : assez des identités musicales et génériques.
Et d’abord, l’identité fondamentale : l’album. Ici mis à mal, puisque dédoublé dans un format incertain, très long disque ou doublet de courts albums – différents dans leur approche (l’un feutré, l’autre plus sonique) – mais familiers l’un à l’autre dans leur effort de rupture, d’accoutrement nouveau et de mascarade électronique. La revue anglaise parlait de « sampladelia » pour qualifier ce doublon
Hermoso Movimiento + Florece Escondido, et pour cause : il s’agit bien, à chaque seconde, de fêter le changement, l’impermanence du monde à travers celle du son. Si les confetti sonores jaillissent, profus, au milieu des samples latino-américain (
Dicho sin palabras), d’infimes sons de toute origine gagnent la masse sonore compacte qui se déploie ici : le Field Recording, non plus comme un moyen de capter le monde, d’en garder une trace qui résisterait au temps, mais désormais comme acquiescement à l’instant, une manière d’exhausser la fluidité de toute chose.
Et de fait, ces deux albums (
Hermoso Movimiento surtout) connaissent parfois quelques temps morts, quand l’effort de poésie prend le pas sur la marche joyeuse des sons. Sans que cela interdise à ce disque d’être une proposition de musique électro-acoustique à la fois consciemment expérimentale et pleine d’allant, de sympathie accueillante pour ses auditeurs.
Chroniqué par
Mathias
le 06/03/2006