Etranges chansons d’évasion que celles de
Veda Hille et
Christof Migone, qui tournent davantage autour d’un sentiment de claustration intime qu’autour de l’échappée à proprement parler. Mais peut-être, justement, que l’évasion est dans cette manière qu’ont les dites chansons de toujours se dérober : à une progression ou à une dramaturgie pop, ou aux schémas attendus, ou encore au format chanson.
Chansons d’évasion, parce qu’elles sont toujours en défaut, parce qu’elles recèlent en leur cœur un
manque-à-chanter (
Lick) qui, à défaut de produire des chansons au sens propre du terme, engendre une substance musicale apte à surprendre. Substance faite de vide, pour une pop déglinguée, rachitique (2), avec un défaut de sens à la clé. Un lo-fi électronique rompu à la manipulation sonore (l’exploitation de la stéréo en 2) du peu qui le constitue, comme si, devant la pauvreté assumée du matériau,
Migone et
Hille cherchait à toujours rassembler leurs quelques cailloux et bibelots sonores, dans un geste compulsif, répétitif, inventaire perpétuellement recommencé des maigres richesses amassées.
Chansons vagabondes, art de la faim qui est aussi un minutieux exercice d’équilibriste où à quelques bribes de phrases indéfiniment mises en boucles succèdent des fragments de ténuités sonores, nappes faméliques, drones muets, pulsations sans avenir autre que leur présence, ici, sur le disque et dans les enceintes, qui tente de venir au bout d’échafaudages de sable rêvés, inventoriés, presque construits mais trop fluide encore pour tenir debout.
Aucun effort possible pour espérer enfin stabiliser ces chansons. On peut entr’apercevoir leur fuite, puisque
Squint Fucker Press en publie quelques instantanés. Art du calendrier, des éphémérides.
Chroniqué par
Mathias
le 20/12/2005