La dernière édition de l’Europa Djaz Festival du Mans honorait la contrebassiste
Joëlle Léandre au point de la charger de la programmation d’une « Joëlle Léandre Suite », série de concerts donnés en compagnie de musiciens qu’elle aura dû choisir. Entre une soirée passée en compagnie d’
Irène Schweizer et
Maggie Nicols et une autre donnée en duo avec
William Parker,
Léandre retrouvait, le 28 avril 2005, la chanteuse américaine
Lauren Newton.
Si les deux femmes connaissent souvent la joie des retrouvailles, elles refusent d’évoquer le moindre souvenir, pour mieux engager toujours leur duo improvisé sur le terrain d’une fraîcheur régénérée. Insatiable dès le départ, l’archet de
Léandre pose des sonorités grinçantes sur lesquelles
Newton se fait peu à peu une place, assez confortable bientôt pour oser les premiers cris faussés par un vibrato lyrique (
Face It 1).
Distillant des allusions au swing et à la pop sous un archet tout à coup plus percussif (
Face It 2), ou multipliant les expérimentations chargées d’effets de gorge, de sifflements et d’expressions assumant l’onomatopée comme moyen efficace de communication (
Face It 4),
Newton peut donner l’illusion d’être sous emprise ou, au contraire, démontrer une maîtrise assez poussée pour se permettre un peu de légèreté, voire, d’humour (
Face It 2).
Plus éloquent encore, lorsque
Léandre et
Newton se cherchent : l’archet rattrapant au col une note tout juste échappée des lèvres de la chanteuse (
Face It 5), ou la voix faisant écho sur le vif à une fulgurance insoupçonnable concédée par la contrebasse (
Face It 7). En un mot, une entente appropriée. Ou réappropriée, conclue à merveille par
Face It 9 : bel canto de terres éloignées, où l’improvisation n’est toujours pas affaire de sauvages.
Chroniqué par
Grisli
le 03/12/2005