En intitulant
26 mixes for cash la compilation des remixes de Richard D. James,
Warp joue la provocation pour mieux devancer les accusations potentielles d'opportunisme.
On peut comprendre que l'ex-maison de Sheffield craigne les critiques : au premier abord, le label peut sembler exploiter les références d'
Aphex twin de son catalogue pour servir un projet rétrospectif de circonstance. Projet qui s'ajouterait à une longue liste de concepts bâclés sortis ces derniers temps, d'autant plus qu'on soupçonne que l'artiste n'est pour rien dans cette sortie, lui qui affirmait dans une rare interview (consécutive à l'album
Drukqs) vouloir désormais consacrer l'exclusivité de son travail à son label Men (monté avec Tom Jerkinson aka
Squarepusher).
C'était sans compter avec le public d'aficionados de Richard toujours à l'affût des nombreux trésors cachés de sa discographie. Que Steve Beckett (seul aux commandes de Warp) se rassure, quand il s'agit d'AFX, il y a immanquablement des fans pour répondre présent.
Sur les deux disques du coffret sont déclinés tous les attributs de production de Richard, à savoir sa facette plutôt ambient sur les trois premiers titres du CD1 (dont
Aphex Twin Care Mix de
Journey par gentle People) notamment, toujours aussi pertinents dans le registre chill-out ? ans après, et ses rythmiques expérimentales si particulières, imitées par toute une génération, sur Ziggy de Nav Katze - Aphex Twin Mix #1 - (qui évoque le
Richard D. James album). comme pour contredire une quelconque "formule miracle" d'atmosphères tranquilles, le remix de Bowie (qui rejoue le coup de l'orchestration par Phillip Glass tentée autrefois sur "ICCT Hedral") apparaît comme une peau de banane sur la première galette, une relecture un peu instable concédons-le.
Sur la seconde, la réinterprétation des Fantastichen Vier, l'Acid Edit de son hit
Windowlicker, la révision tubesque de DMX Krew, et surtout l'énorme furie de
We Have Arrived (Aphex Twin QQT Mix) poursuivent ce décalage.
Avec une majorité d'instrumentaux vaporeux hors du temps (essentiellement sur le premier CD), ces remixes réaffirme le surdoué natif des Cornouailles comme un surdoué des machines, qui sait quand il le faut éclipser quelque peu sa forte identité musicale pour mettre au service du morceau-client toute sa maîtrise technique (la véritable définition du remix).
Si
26 mixes for cash est réellement un prétexte à la subsistance du monsieur, il réalise également avec cette sélection une démonstration implacable de son talent, et ajoute une pièce à la valeur historique indéniable dans le registre "intelligent techno - ambient - elecronica" (appelez cela comme vous voulez) du Patrimoine Mondial de L'Electro.
Chroniqué par
Guillaume
le 29/03/2004
