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Panoramas

: Édition 2003



Notre compte rendu

Dès l'arrivée à Morlaix et la rencontre avec les organisateurs, une première impression se dégage de suite : une certaine simplicité dans les rapports et une bonne humeur générale, saupoudrée d'une petite dose d'excitation ambiante venant parfaire le tout.

Dans les backstages, La Caution, Abstrackt Keal Agram ou Teddybear du Psykick Lyrikah discutent entre eux, James Delleck semble perdu dans ses pensées et déambule dans les couloirs, Cuizinier et Teki Latex de TTC font l'aller- retour entre la scène et les loges. Pas de - prise de tête ni de - grosse tête, les loges sont toutes identiques, les serveuses charmantes et l'organisation irréprochable. Pendant que les balances s'enchaînent, nous en profitons pour commencer les interviews qui se déroulent dans les loges des différents artistes présents : les locaux de la soirée, Abstrackt Keal Agram, seront les premiers.

Simples et ouverts, Tanguy Destable et Lionel Pierres se prêtent au jeu dans la plus totale décontraction. Apparu la première fois il y a quatre ans pendant ce même festival Panoramas, AKA est né pour " combler une petite place dans la programmation ". Nos deux compères, officiant alors plutôt dans un registre " rock et noise " mais composant depuis peu à l'aide de machines, se sont alors décidés à tenter d'offrir à un public " une performance vidéo et sons " basée essentiellement sur l'impro et à partir de vidéos réalisées eux-mêmes. " L'idée était d'assurer une sorte de petit hold up musical, sans suite " d'où un nom volontairement imprononçable ".
Alors, quand ils se retrouvent ainsi quatre ans après, c'est avec plaisir qu'ils en font profiter leurs potes que l'on retrouve sur l'album (La Caution, James Delleck, ARM (du Psykick Lyrikah), Robert Le Magnifique). Mais AKA n'est pas non plus ce type de groupe jouant sur ses acquis en usant et abusant d'un public déjà conquis : ils tiennent à éviter de trop jouer par chez eux, refusant même dorénavant quelques dates afin de ne pas " saouler les gens à revenir ici tout le temps " et de ne pas s'afficher dans un " martelage promo ". Alors aujourd'hui à Morlaix, hier à Paris, demain à Orléans (en première partie d'Amon Tobin, rien que ça ...) et avec quelques dates de prévues dans les mois à venir au cours des nombreux festivals du printemps et de l'été.
Très loquace, la discussion s'enchaîne sans temps mort : l'arrivée sur Gooom après la sortie du premier album éponyme sur Monospone, (" une très bonne expérience mais on n'était pas très en phase avec les groupes qui étaient sur le label "), où ils retrouvent plusieurs groupes qu'ils affectionnent (M83 ou Gel par exemple), même s'ils restent conscients d'être " la première signature un peu hip hop sur Gooom ". Influences hip hop revendiquées mais pas seulement : " On a eu un gros electro-choc avec Nirvana. Kurt Cobain nous a montré qu'avec une mélodie " à la con " avec trois accords, tu peux faire un truc qui sonne. Même si on fait du hip hop, la base doit rester mélodique. On a des mélodies vraiment très cheap avec juste trois, quatre notes mais qui font que ça sonne, c'est l'esprit qu'on veut garder ".
Alors quant à définir leur style, mettons les mots que l'on veut, eux s'en fichent pas mal, même s'ils se reconnaissentcependant au travers d'artistes comme Shadow (son premier album, " Endtroducing " tout particulièrement), Cam ou Krush sur leur premier album et d'avantage sur Prefuse 73 ou, plus largement, un label comme Def Jux pour le second.
Jeune groupe donc, composés de deux membres (auxquels se greffent, pour leurs prestations live DJ Dude) eux aussi très jeunes (23 ans chacun) mais déjà une bardée de projets : remix de High Tone, de La Caution, ou d'Atoms Family (que l'on retrouve également sur Cluster Ville) travail sur une pièce de théâtre, projet solo pour chacun d'eux (sous le pseudo de Tepr pour Tanguy chez Idwet, rien de décidé encore pour Lionel pour l'instant) ... on ne chôme pas certes mais on ne vit pas encore pleinement de sa musique. Alors, on garde les pieds sur terre et lorsqu'on leur demande ce qu'il pense de ceux qui leur collent (déjà) l'étiquette de "représentant d'un nouveau style " en France, nos deux amis répondent spontanément : " En se déclarant pionnier d'une scène, on risque de se faire plus d'ennemis qu'autre chose. Alors nous, on préfère dire qu'on aime tout le monde et faire profil bas ". Du moment qu'on vous entend et voit encore sur scène ...


Quelques heures plus tard, après plusieurs essais de balance et de mise au point entre eux, nous nous calons dans un fauteuil en compagnie de ceux qui furent à l'origine d'une petite bombe en 2002 avec ce titre posé comme une provocation (" Ceci n'est pas un disque "), j'ai nommé TTC. Les trois comparses, Teki Latex, Tido et Cuizinier, sont, je vous le confirme, aussi imprévisibles en interview que sur leurs productions (la quatrième à ce jour). Délire dans tous les sens et enchaînement d'idées issues d'une logique volontairement casse-gueule caractériseront donc cette rencontre.
Cependant, ceux qui ont déjà travaillé à plusieurs reprises avec des artistes comme Dose One ou Vadim, savent aussi être sérieux, notamment lorsqu'ils évoquent ces collaborations et les différences dans la manière de travailler qu'elles induisent. " Quand certains partent d'un squelette pour ensuite construire le morceau au fur et à mesure, d'autres apportent eux un truc tout fait sur lequel on va se greffer et s'adapter par rapport à la musique, d'autres, enfin, attendent d'avoir déjà une bonne idée de ce que vont donner les textes pour commencer à bosser sur la musique, c'est vraiment différent, y' a de tout. C'est justement ça qui est très enrichissant " avoue Teki Latex (de loin le plus bavard). Cette même diversité qu'ils louent chez des artistes comme CLoudead ou Themselves, en qui ils se reconnaissent parce que " nourrit d'influences diverses, du rock indé américain à l'electro à la Boards of Canada ... ".
Et, comme un contre pied à ce " trop sérieux ", Cuizinier reconnaît être en même temps un vrai " produits des années 80 ", élevé aux jeux vidéos et à la TV. Tido et Teki Latex acquiescent, ce dernier clamant qu'il ne risquait pas " d'être élevé à la soul et au funk " puisqu'il n'y avait chez lui ni disques, ni stéréo ! Sa culture musicale, il se l'est faite à partir du début des années 90 lorsqu'il a commencé à s'intéresser au hip hop " moins médiatisé ". Mais reconnaît il tout de suite après " comme tout le monde, on arrive dans le rap avec les Tortues Ninja, Vanilla Ice et Technotronic " !!!
TTC, c'est aussi ce soir une prestation avec le collectif " L'Armée des 12 " dont le premier album, " Cadavre exquis " est sorti fin 2002. Composé de TTC, La Caution et James Delleck, ce n'est ce soir que leur deuxième prestation sous cette formation. Improvisation et bonne humeur sera leur credo ! De ce côté là, on peut leur faire confiance !
L'interview se termine sur l'explication de l'origine des célèbres " pyjama party ",issues, nous explique Teki Latex, d'un traumatisme d'enfance durant un camp de vacances. La grande soirée pyjama party s'étant en effet déroulée sans qu'il ait eu le temps d'enfiler son fameux pyjama fétiche qui lui aurait permis, à coup sûr, de gagner le concours ... Il est aujourd'hui bien décidé à se venger, vous êtes prévenus ...
Lors de la discussion hors micro, dans le couloir,l'intarissable TekilaTex s'exprime encore sur ses goûts actuels : il cite alors en vrac l'electronica allemande, le rock anglais, Dose One, Boom Bip, Prefuse 73 ou Squarepusher (qu'il cite souvent) ... et même Technotronic !
Décidément, faut croire qu'il a vraiment un truc avec Technotronic ...
(p.s : merci au journalise de Canal B d'avoir su vraiment mener cette ITV)

Quand nous sortons de ce long " entretien ", il est déjà plus de 19h et les premiers groupes vont bientôt entrer sur scène.
Parmi ceux ci, Frigo, sélectionné pour les découvertes 2003 du printemps de bourges. Nous les rencontrons alors une heure avant leur passage, décontractés et décidés à bien faire.
Ce groupe basé en Bretagne (ses trois membres sont de Quimper, Brest et Rennes) mène depuis trois ans maintenant sa barque au son d'une electro pop/rock plutôt audacieuse.
" Comme beaucoup de monde qui était dans la noisy-pop ", ils ont ainsi choisi d'ajouter à leur formation classique guitare/chant-basse-batterie un sampler et un clavier. Même si les influences rock restent indéniables, les références électroniques (principalement Kraftwerk et autres sons des 70's) sont omniprésentes et offrent à ce trio de larges horizons. Ainsi " par rapport à l'écriture des morceaux, on n'a pas de travail de composition bien défini pour chaque morceau " : d'une ligne de basse, d'un riff de guitare ou d'une " trouvaille sur le sampler " peut naître une ébauche de titre, sur lequel chacun viendra rajouter sa touche, quitte à s'éloigner de la ligne de début. Ouverture, mélange, liberté ... certes mais cela a aussi un prix puisque Frigo reste toujours actuellement à la recherche d'un label et d'un manager pour les chapoter : ils font en effet toujours tout eux-mêmes, " même les pochettes qu'on colle nous-mêmes " nous confient-ils avec le sourire. Cela ne les pas empêché de sortir un maxi " XYZ ". Avis aux amateurs et bonne chance pour Bourges !

Il est 20h00 passé, le premier groupe ne va désormais plus tarder. La salle elle, s'est peu à peu remplie.
On remet ça demain ... place au son, finie la parlotte !


- FRIGO :

Le premier groupe à se produire sur scène est un des locaux, à savoir les bretons de Frigo. Discrètement arrivés sur scène, ses trois membres prennent place et sans attendre débutent leur set. Tout surpris, le public se tourne alors au fur et à mesure vers la scène. Bizarre cette entrée...
Au son d'une electro rock assez pêchue et parfois innovante, Frigo doit faire face en ce début de soirée à un public encore assez restreint et pour le moins disséminé. Le son est plutôt bon. De l'électronique certes mais surtout la puissance du rock en ce milieu de set, après un début plus posé et planant. Le jeu de lumière rajoute une petite touche à l'ensemble. Globalement assez convenu, leur musique révèle malgré tout de bonnes inspirations et quelques bonnes surprises. A suivre sur scène à Bourges ainsi que sur le maxi qu'ils sortent à l'occasion, " XYZ ".
http://bigtrip.free.fr/

- AKA :

Peu de temps après, les autres locaux d'Abstrackt Keal Agram arrivent à leur tour sur scène. Le public s'est peu à peu étoffé même si on peut tout de même être surpris de ne voir plus de monde à cette heure.
Ils commencent par le morceau d'introduction de " Cluster ville ", " Del ". Gros son. DJ Dude, aux platines, est très présent sur chacun des morceaux à travers ses scratchs méticuleusement posés. Ils enchaînent avec " Octagone vierge " et son rire obsédant. La guitare posée à l'avant de la scène n'étant pas là pour décorer, Lionel la saisit pour poser quelques riffs, en arrière plan, presque noyés, mais toujours ravageurs. Ils alternent entre leurs deux opus et restent très fidèle à leurs compositions. " Petersbourg " et son leitmotiv de fin. Le public, jusque là plutôt passif, semble peu à peu " se réveiller " face aux trois membres qui sont, eux, parfaitement dedans.
Apparaissent alors La Caution (Nikk Furrie et Hi Tekk) et James Delleck pour le morceau " L'oreille droite " : incisif et sans concession, la prestation reste très (trop ?) fidèle à l'originale.
AKA se mue en duo, DJ Dude s'éclipsant alors, et retourne à une electronica torturée, sur un beat d'abstract. Ils se lâchent alors peut être un peu plus à ce moment et osent peu à peu de petits détournements de leurs compos originales. Quelques minutes plus tard, Robert le Magnifique, revêtu d'un casque de chantier, prend possession des platines et discrètement s'installe. La complicité avec AKA est indéniable, ces trois là se connaissent, c'est clair. Le rythme monte tout doucement. Encore un invité : il s'agit cette fois de Arm, du Psykick Lyrikah, pour un titre (" Le dernier chapitre ") issu de leur street tape récemment sortie : flow tranchant, textes inspirés, la prestation est saluée par le public ravi de voir le ton continuer à monter C'est Tanguy qui prend maintenant la guitare : ça chambre dur avec le DJ, ce dernier clôturant le set avec une de ses séances de scratchs qu'il exécute avec brio et décontraction. Un très bon concert !
http://www.e-one-o.net/aka/

- Interlude du MC du son du peuple, jc001 :

A peine AKA terminé, celui qui se présente comme " le premier MC du Peuple de l'Herbe " répondant au nom de JC001 monte sur scène. Après un bref laïus où il dénonce les aspirations belliqueuses des américains face à l'Irak, JC001 nous fait alors une petite démonstration de human beat box et retrace ainsi une partie de l'historique des musiques électroniques à travers l'évolution du beat, que celui-ci soit house, techno, hip hop … de la fin des 70's au début des 90's.
Impressionnant ... et très ludique !
http://www.jc001.com/

- TTC :

Environ une demi heure plus tard, les membres de TTC (Tido Berman, Cuizinier et Tekki Latex) arrivent un par un sur scène, accompagné de leur DJ. Ils partent en une sorte d'impro et, d'emblée, annoncent la couleur : ils ont bien l'intention de foutre le feu ! Ils semblent très à l'aise sur scène, sont " chez eux " ici aussi ! Dès le second morceau, James Delleck apparaît à leurs côtés pour une " Soudaine montée d'adrénaline dans l'éloge ", extrait de " Ceci n'est pas un disque ". Très bonne prestation en ce début de set. Ils sont réellement sur scène comme en interview : simples, directs et efficaces ! Lorsqu'ils avouent, à un moment, être impressionnés par la taille de la salle et le monde présent, tout le monde semble se regarder et se demander s'ils délirent ou s'ils disent vrai. De suite après, la question est oubliée puisque tout le monde est invité à faire comme à la maison : tous à poil !

Ils enchaînent ensuite un par un en séance de slam : lyrics bien posés, flow impeccable … TTC nous balance ces " classiques " : " je n'arrive pas à danser ", " Teste ta compréhension " … avec bonne humeur et nonchalance ! Retour de James Delleck pour deux titres.
Arrivée ensuite de La Caution, d'abord seuls sur scène, annonçant L'armée des 12 : deux morceaux " hip hop-core ", lorgnant sans complexe vers une grosse base métal. Retour de TTC pour finir de constituer l'armée des 12. Un peu fouilli au début, chacun trouve peu à peu ses marques et les enchaînements de MC se font de plus en plus fluide et précis. Tekki Latex demande un peu d'indulgence pour ce qui n'est ce soir que leur seconde prestation ensemble : c'est plutôt bien réussi ! … (malgré peut être un petit bémol, au niveau de la qualité du son...).
http://www.bigdada.com/artist.php?id=36&search=ttc#1

- ZENZILE :

Les angevins de Zenzile arrivent à leur tour sur scène. Le quintet (basse, guitare, batterie, clavier et sax, auxquels s'ajoutent percus et melodica) nous offre alors un dub de haute tenue : le son est très bon, le jeu de lumière concourre à installer une ambiance autour de leur musique et chacun des protagonistes semble réellement prendre plaisir à jouer sur scène. Nombre des morceaux présentés sont issus de leur dernière production (" Totem "), considérés par certains comme leur meilleur album.
Une grosse basse ronde, des effets utilisés avec parcimonie (pas de " démonstration " ici, ni d'envolées lourdes et consensuelles) et une large place réservée aux instruments (notamment un sax très présent) : Zenzile pose ses marques, celles qui en ont fait une des véritables (pour certains LA) référence dub française.
Prenant le temps d'installer chacun de leurs morceaux, ils savent faire monter la pression sans pour autant augmenter le rythme : un savant dosage, exécuté avec maestria. Les morceaux s'enchaînent sans temps mort malgré une relative passivité du public. Zenzile nous dessert ici un set carré, puissant et relevé. Aérien et consciencieusement construit, leur dub mélodique et envoûtant finit de nous emmener loin, très loin …
http://www.zenzile.net/

- LE SON DU PEUPLE :

Cette fin de soirée se termine sur le mix percutant du " Son du Peuple ", à savoir le " Peuple de l'Herbe " en sound system.
Nos 2 DJ lyonnais, accompagné pour l'occasion par le MC anglais JC001, semble bien décidé à clore cette première soirée du festival par un déluge de sons. Ca tombe bien, le public ne souhaite visiblement pas quitter la salle sans se foutre une bonne dernière claque avant de partir. Et il sera comblé.
Fidèle à leur réputation de DJ éclectiques, DJ Pee et Nzeng puisent à la fois dans la jungle, la drum'n bass, le hip hop, le break beat ou la house dans un but unique : faire remuer tout ce petit monde ! Loin des ambiances enfumées du premier album, on retrouve plus la patte du second album (" PH Test vol 2 "), sans les cuivres mais avec un esprit beaucoup plus dancefloor, ce qui reste somme toute logique pour une prestation orientée sound system … Le MC, au flow impeccable et à la voix tranchante, pose sur une rythmique jungle et invite chacun à investir le dancefloor, à se lâcher sur le son débridé et percutant délivré par les énormes enceintes qui entourent la scène. Un p'tit détour vers des sons plus 80's (encore et toujours ce revival 80's ? décidemment …) et hop ! on repart sur une rythmique où les bpm s'enflamment et les infrabasses tabassent … Hmmm, trop bon !
Un très bon set encore une fois : avis à ceux qui n'ont pas encore eu l'occasion de les voir en concert (sous cette forme ou sous la forme complète du Peuple), courrez, foncez … vous ne devriez pas être déçus !
http://www.lepeupledelherbe.net/


Après une courte nuit, retour à Langolvas. Toujours les mêmes qui s'affairent dans tous les sens, toujours cette bonne ambiance et cette décontraction malgré un réveil souvent douloureux ...

L'attente étant (paraît-il !) le maître mot du journaliste, on attend donc, tranquillement, que les premiers artistes soit prêts à nous recevoir.
Ce sera, comme la veille, les artistes de chez Gooom, qui les premiers nous accueilleront dans leur loge, à savoir les Antibois de M83. Ce sont deux toutes jeunes personnes qui se présenteront donc à nous, 22 ans chacun. Tous jeunes certes mais avec à leur actif un premier album éponyme sorti en 2001 qui leur à permis de se hisser directement au rang de référence electronica de la scène hexagonale.
Après une prestation très remarquée l'an dernier au festival de la Route du Rock à Saint-Malo, M83 s'apprête ce soir à lever le voile sur leur nouvel opus à paraître le 15 avril prochain, toujours chez Gooom. " Un disque avec davantage de guitare, la présence de chants ... plus dans un format chanson en fait " nous confient-ils. Une approche qu'ils avaient justement un peu délaissée après s'y être essayée durant quelques années, au profit des musiques électroniques leur permettant de sortir de ce " carcan ". Un album donc " plus rock, plus rentre dedans " tels qu'ils le définissent eux-mêmes, Nicolas persistant à la guitare malgré ses aptitudes (" j'suis nul mais je continue quand même " - rires).
Ce retour volontaire aux instruments ainsi qu'à un format musical relativement différent de leur précédent album ne les fait pas pour autant abandonner leur passion pour les machines. Ce n'est cependant qu'un an avant la sortie de leur premier album que les deux comparses commencent à s'y intéresser de près et deviennent peu à peu fan (entre autres) du catalogue Warpien. On trouvera donc toujours ces longues échappées raffinées et torturées, ces sons surgis de nulle part mais qui savent où ils vont, ces envolées démontées ... qu'on se rassure !
" Dead cities, red seas and lost ghosts ", qui sort le 15 avril prochain, sera aussi l'occasion pour eux de faire intervenir plusieurs de leurs collègues de chez Gooom dont un certain Benoit de Villeneuve. Un album très attendu qui devrait donc s'avérer riche en surprise.
Nous nous quittons alors en attendant, non sans une certaine impatience, de les découvrir sur scène tout à l'heure et d'apprécier en exclusivité les morceaux à venir sur le prochain album ...

Alors que déjà des " collègues " entre à leur tour dans la loge de M83, nous reprenons nos postes d'attentes. Alors, vite fait, je vais faire un petit tour du côté des balances : dans la salle, forcément vide, le son est énorme. La disposition est la même : de grands " canapés " en bois recouvert de moquette bleue à droite en rentrant, en face des portes d'entrée le même grand rideau rouge qui scinde la salle en deux, puis derrière, la régie, à sa gauche l'inévitable bar (qui fermera, pour le plus grand malheur de nombre d'entre nous, à 2h quand la musique elle continuait encore ...), un large espace pour le public et enfin la scène. Autour de celle ci, de plus en plus de monde s'affaire, artistes, éclairagistes ou régisseurs.
Il est temps d'y retourner. Quelques dizaines de minutes plus tard, The Youngsters nous reçoivent à leur tour. Comme tous les autres artistes rencontrés ici, ils sont simples et tout à fait accessibles.
Nous leur faisons remarquer qu'à l'entrée de la loge qu'ils occupent, une affiche annonce " Michèle Torr " en raison de sa venue prochaine dans cette même salle. Ils l'ont également remarqué ce qui n'a évidemment pas manqué de les faire marrer en entrant.
Originaires de Valence et de Montpellier, c'est " tout naturellement " pourrait on dire qu'ils se sont très vite intéressés à la scène techno. Composés de Gil le Gamin, DJ depuis une dizaine d'année et d'Olivier M., musicien depuis des années, ce duo nous délivre une musique " dansante avant toutes choses ". Ensemble depuis maintenant quatre ans, ils ont su s'enrichir de leurs " cultures musicales différentes " pour aborder " des goûts musicaux qui se rejoignent " et en ressortir une techno festive, " groovy et mélodieuse, organique avec des sons qui n'ont pas forcément grand chose à voir à la base. ... ". " C'est peut être ça la définition de la techno en un sens " poursuit il, " mêler des sons très robotiques avec des sons plus sensuels". On ne dira pas mieux !
Adeptes de ces mélanges qu'ils savent porteurs aussi bien de " trucs bidons " que de " trucs qui sonnent ", ils travaillent réellement à deux, " de manière assez fusionnelle ", avec rarement de désaccord entre eux ...
Après plusieurs maxis, ils ne sortiront au début de l'année prochaine que leur deuxième album (chez F-Com) : ils refusent en effet de participer à cette " course à l'album " à laquelle ils ne croient pas, préférant écumer les scènes, où ils se " nourrissent à chaque fois ", comme ils le font depuis maintenant deux ans. Ou encore travailler avec d'autres artistes qu'ils affectionnent (comme, par exemple, avec Erlend Oye, moitié de Kings of Convenience, dernièrement).
Quand on les questionne enfin sur leurs projets, ce même souhait de poser avec d'autres artistes, d'univers musicaux différents émerge en premier, même si Gil le Gamin intervient à un moment en précisant qu'il préfère prendre le temps de voir les choses venir. " J'évite de trop rêver, ça évite de se faire trop mal quand on se casse la gueule " : les pieds sur terre, la tête dans étoiles en somme. Une " recette " qui semble jusqu'ici avoir portée ses fruits : qu'il en reste ainsi encore longtemps, c'est tout le mal qu'on peut leur souhaiter !

En sortant de l'entrevue, nous sommes invités à enchaîner direct avec Rootsman. Nous entrons donc dans sa loge, contiguë à celle de M83.

Là, Rootsman, accompagné d'un MC, anglais lui aussi, nous reçoit en arborant un large sourire. Notre homme est un blanc, plutôt grand, avec de petites lunettes rondes et une voix posée et grave. Il se prête lui aussi tout de suite au jeu.
Producteur de dub et de reggae basé à Bradford (nord de l'Angleterre), Rootsman nous décrit son parcours musical : " élevé dans la musique ", il s'achète dès l'âge de treize ans sa première guitare. Deux ans plus tard, premier concert au sein de son groupe de l'époque. Il s'intéresse alors presque exclusivement à la vague punk qui touche l'Angleterre de plein fouet et cite en vrac " Ramones, Stooges, NY Dolls, Sex Pistols, Alternative TV ... " comme ses principales références de l'époque.
C'est par la suite grâce à " cette énorme rencontre, ce croisement entre le punk et le reggae de la fin des 70's au Royaume Uni " qu'il va alors se tourner progressivement vers le mouvement reggae. " C'est ce même refus de l'establishment commun aux deux mouvements qui a rendu possible un tel rapprochement " nous explique t'il. " La situation des gens de couleur à cette époque était réellement intolérable ", situation rendue d'autant plus impossible que le National Front (inutile de traduire ...) voyait sa popularité chaque jour augmenter au sein de la société britannique. Il se tourne alors (" tardivement puisque vers 18 ans seulement " tient il à préciser) vers le reggae, revendant tous ces albums punk (" même ceux dédicacés ! ") pour pouvoir s'acheter les nouvelles productions reggae qui inondent peu à peu le marché anglais. Avec le recul, Rootsman nous décrit cette période comme étant celle où il a vraiment fait du reggae " son grand amour ". Abandonnant le " format groupe ", il s'adonne alors seul à sa nouvelle passion et souhaite très vite passer derrière les platines. Reggae, ragga, dub, jungle ou drum'n bass (son choix pour ce soir, fonction pour partie du reste de l'affiche) ... voilà désormais le champ d'action couvert par notre homme.
Il s'inspire pour cela (entre autres) de musiques orientales (il s'intéresse beaucoup au raï et à la musique turque) : il avoue adorer " s'approprier des influences de différentes sortes de musiques pour les assembler et en faire un vrai morceau de dub ". Ce qui s'est beaucoup fait il y a plusieurs années, avec la musique indienne notamment, même si, regrette t'il, " cela passe pour ennuyeux aujourd'hui ".
Cette même culture de l'éclectisme le pousse vers les scènes de tous les pays du monde, sans distinction : " en France ou en Allemagne bien sûr, deux grandes scènes reggae, mais aussi en Croatie, Serbie, Italie, Finlande, Tchéquie, Pologne ... " ou encore, comme le mois prochain " pour (sa) première date en Afrique, au Mozambique ". S'il se réclame prêt à jouer partout, ce la ne veut pas dire pour autant qu'il reste indifférents à ce qui se passe chaque jour autour de lui : " Quelqu'un qui écouterait du reggae et ne se soucierait pas de la réalité, à savoir celle de toutes les personnes qui vivent dans une immense pauvreté à travers le monde, agirait en hypocrite. Une personne bonne ne peut pas rester indifférente au sort des oppressés et doit faire entendre sa voix contre les inégalités et les injustices ... comme dans le cas actuel de l'impérialisme des Etats Unis et de la crise irakienne ". Alors si sa voix à peut permettre de faire passer ce message, il agira : sa prochaine production traitera justement de la politique menée par le gouvernement américain et de sa volonté de main mise sur le monde : " je soutiens chaque personne qui, dans le monde, se bat chaque jour pour plus de démocratie ". Pour preuves les nombreux liens présents sur son site web (http://www.therootsman.co.uk/) vers des écrivains, artistes ou organisations qui se mobilisent en ce sens.
Comme pour affirmer avec force ces positions, Rootsman conclut sur un " Babylon must fall ", véritable credo rastafari. Belle chute non ?

Fin des interviews. Alors comme hier, même punition mais nouvelle scène. Ca s'annonce encore une fois plutôt bon comme soirée ... Juste le temps de taper la balle une petite demi heure avec nos antibois et Lionel d'AKA dans la salle ... Quand je vous disais que l'ambiance était plutôt à la décontraction ... essayez, " juste pour voir ", l'an prochain ...


- GLOBAL PURPOSE :

En ce second jour de festival, ce sont encore des locaux qui ouvrent le bal : Global Purpose est en effet un petit collectif brestois composés de trois membres. Récent arrivés sur la scène dub, ce trio mélange des sonorités laptop minimalistes et un dub inspiré.
Une arrivée discrète sur scène. Il n'est jamais facile d'ouvrir une soirée, encore moins lorsque l'affiche est, comme c'est le cas ce soir, pour le moins éclectique. Les membres de Global Purpose s'en sortent plutôt bien malgré tout même si, encore une fois, le public n'est pas encore totalement au rendez vous en ce tout début de soirée. Ils mélangent allègrement et avec pas mal d'ingéniosité une electronica plutôt froide et " déshumanisée " avec des sonorités dub ou arabisantes empreints de chaleur.

Une prestation très agréable, une fine mise en bouche avant d'attaquer la suite et les " grosses pointures " …

- LA COMPAGNIE GERANIUM :

Entre Global Purpose et M83, à l'entrée de la salle, la Compagnie Géranium nous propose un spectacle de trapèze exécuté par deux femmes. Pour seul décor un tapis rouge circulaire posé sur le sol, sous les trapèzes, ainsi qu'une sorte de petite voûte blanche en toile située juste au-dessus, où se reflète la lumière des spots.
Plusieurs musiques accompagnent le spectacle (Noir Désir " des armes ", Susheela Raman, une musique de style traditionnel japonaise (!!) …). Les lumières à dominante rouge avec en sus un spot jaune, donnent au spectacle un air assez surréaliste. Gestes lents et pauses méditatives, sensualité et nonchalance des deux protagonistes … une brève pause plutôt agréable.

- M83 :

Retour sur la scène où M83 vient de prendre place. Ils débutent leur set sur de longues nappes ambiantes, instaurant ainsi directement une ambiance particulière. On retrouve ici la marque de leur electronica personnelle et classieuse. Le morceau se termine néanmoins sur un riff percutant de guitare saturée jouée par Nicolas, qui laisse ainsi quelques instants son comparse Anthony seul aux machines.
Puissance et qualité du son sont encore au rendez vous. Suivent alors quelques pistes tirant plus sur une sorte d'electro foutraque (on pense à la fois à Cosmo Vitelli ou à Mr Scruff par exemple) : bizarre ça ! Retour à une thématique plus en phase avec leurs aspirations connues, une electronica ambiant et mélodieuse sur laquelle se greffe un ensemble de sons et de rythmiques beaucoup plus déstructurés. Les deux antibois restent très concentrés tout au long du set, s'acharnant avec fougue sur leurs machines par moment.
Le concert est, comme prévu sur le flyer et confirmé lors de l'interview, ponctué de morceaux en avant première de leur future production, " Dead cities, red seas and lost ghosts ". Les quelques morceaux où intervient la guitare annonce un album plus vif, troquant par instant l'imaginaire et l'évasion au profit de la force et de la puissance.
Au crescendo du début de set répond une lente descente vers une musique plus posée, invitation à la rêverie et au voyage vers cette fameuse galaxie M83 située à 15 000 kilo-années lumières de notre planète bleue. C'est sûr, ça fait une petite trotte … (une p'tite photo de la galaxie ? ici). Plus près de nous, rendez vous est pris le 15 avril pour la sortie de leur second album !
http://www.gooom.com/

- ROOTSMAN :

Au milieu de ce parterre d'artistes français, Rootsman est le premier à déroger à la règle puisqu'il nous vient d'outre manche. Accompagné ce soir d'un MC, il s'agit de son unique date en France. Raison de plus pour apprécier la prestation à juste valeur !
Partant sur son terrain de prédilection, à savoir un dub-reggae-ragga assez relevé, Rootsman nous montre très vite sa large culture musicale et les nombreux courants dont il s'inspire (jungle, drum'n bass mais aussi musiques traditionnelles ...). Une jungle vive et percutante vient échauffer encore un peu plus les esprits et asseoir définitivement le règne de lourdes basses. Au sein des premiers rangs, conquis par une rythmique entêtante, les sourires sont larges comme des bananes et les yeux pétillent : on prend son pied quoi ! Et si les quelques " pains " qui s'immiscent dans la seconde moitié du set sont promptement sifflés, ils seront tout aussi vite oubliés par un public bien décidé à danser et à s'en foute plein les oreilles. Partant de vieux reggae comme de ragga, Rootsman sait concocter les bonnes recettes, en grand maître des sound system qu'il est ... Le MC pose à de brefs moments, rajoutant ainsi encore plus de rythmes et de chaleur à l'ensemble.
Le ton monte encore d'un cran en cette fin de set lorsque Rootsman pose son très prisé (en Europe de l'Est notamment) remix d'un morceau de " trash-métal " (à l'origine écrit par Soulfly, moitié de ex-Sepultura, me suis-je laisser dire : avis à qui saura infirmer /confirmer ...), précédé d'une courte mais claire condamnation du gouvernement Bush et de la future intervention en Irak.
Rootsman quitte ensuite la scène, non sans saluer son public et appeler une dernière fois, à toujours plus de communion entre les peuples : " Peace love and unity ! ".
http://www.therootsman.co.uk/)

- AMON TOBIN :

Une petite demi-heure plus tard, Amon Tobin fait une entrée discrète et se réfugie derrière ses machines, placées plus en retrait que celles des DJ précédents. La salle, certes pas remplie à 100%, s'est malgré tout vu peu à peu envahir de toute part pour assister à celui qui reste sans doute la tête d'affiche de ce festival.
Il débute le set sur " Back from space ", le morceau d'introduction de " Out from out where ", son dernier album. La petite crainte d'assister à une simple prestation d'enchaînements disparaît aussitôt que le Brésilien attaque sur une drum'n bass furieuse. En cinq minutes, le public est conquis. Les problèmes liés au passage à final scratch, tels qu'il a pu en connaître lors de ses récents passages à Paris et Bordeaux, semblent aujourd'hui oubliés. Il mixe ses propres morceaux (qu'il n'hésite pas à accélérer) avec de puissants beats jungle, invitation ouverte à se déchaîner sur le dancefloor.
Puisant largement dans son dernier opus (" Hey Blondie ", "Verbal " " Rosies "...) , il emprunte également beaucoup à ses anciennes productions (" Four ton mantis ", " Yasawas ", " Stoney Street ", " Easy muffin " ... ) en ayant toujours ce souci de ne pas reproduire le déroulement du titre à l'identique de l'original, en l'agrémentant d'un ensemble de rythmes jungle ou drum'n bass. Cette première partie de set est surtout marquée par la " relative absence " de breakbeat, au profit de beats plus dansants. Un visuel (pas très convaincant d'ailleurs ...) accompagne la prestation d'Amon Tobin, lequel semble noyé derrière ses machines, lui dont la taille est inversement proportionnelle au talent (il mesure en effet à peu près 1m 60/65). On goûtera même avec plaisir une brève incursion dans la grande et faste période Blaxploitation retravaillé à la " sauce Tobin ", avant de repartir sur " Out from ... " (" Searchers "). Le set est dès plus riche et extrêmement plaisant.
La fin de set est elle par contre beaucoup plus orientée breakbeat (" Chronic Tronic ", " Triple Science " ...) et se révèle peut être encore plus époustouflante par son déluge de sons et de beats dans la pure lignée des livraisons de Tobin. Un régal. Et je ne suis pas le seul à me délecter. Les fans ont les yeux rivés sur ... ce qu'il peuvent voir (fumée, jeu de lumière empêchant de distinguer clairement la scène), pendant que d'autres semblent ne plus savoir où donner de l'oreille... ambiance un peu surréaliste ...
Le set se clôt finalement : pendant vingt minutes je vais rester avec des sons plein la tête, entêtants, envoûtants ... Trop bon ... Là, honnêtement, j'ai pris une sacrée baigne !
http://www.amontobin.com/

- THE YOUNGSTERS :

Les Montpelliérains de chez F-COM nous délivrent un set dans la droite lignée de leurs compositions et s'acharnent à foutre le feu à un dancefloor ... qui s'est rapidement démuni après le départ d'Amon Tobin. Les irréductibles s'en donnent eux à cœur joie ! The Youngsters servent une techno faisant le grand écart entre la France et Detroit, un croisement de sonorités froides et de mix chaleureux. Jouissif !
http://warmup.org/theyoungsters/

Une fin de soirée, après Crystal Distorsion à suivre, certes éreintante mais des plus agréables, à l'image du festival dans son ensemble. A refaire, sans aucun doute !


p.s : nous n'avons pas pu interviewer Amon Tobin (fatigué) ni Le Son du Peuple (le peuple de l'herbe en sound system) et Zenzile, arrivés, eux, trop tard ... Désolé ...

par Oropher
le 01/06/2003

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1 commentaire
www.mysapce.com/ladiago
par bejn (le 10/01/2008)
C'est la plus belle chose que j'ai pu lire à propos de La diagonale du fou, et pas que dans la forme. Magnifique...

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