Derrière la façade exportable de ce qu'on appellera rapidement la musique, se cachent des centaines de groupuscules qui massacrent guitare, batterie, synthé, laptop avec le même bonheur que les petits enfants pissent sur une fourmilière. Un bonheur souvent étroitement proportionnel à leur talent et leur niveau d'anonymat. Et ce, bien que depuis belle lurette la conjoncture ait changé et qu'on sache que les esprits curieux aussi ont leur place dans les charts.
Reste donc la patience. Et attendre l'avènement de groupes comme les Italiens d'Appalooza, les Français de Filiamotsa ou encore les Suisses de Dirty Purple Turtle, dignes successeurs de leurs compatriotes des Young Gods, qui sortent ces temps-ci Medicine and Madness, un disque tentaculaire autant que spectaculaire.
Un disque monstrueux, péplum pantagruélique bâti sur les ruines en gestation du XXI° siècle par deux esprits libres et malades, David Zingre à la batterie et Daniel Zimmermann aux machines.
Un disque fleuve où l'esprit live règne, à la fois psyché et contemporain, fabriqué à la main sur les fondations d'un kraut-rock des plus instinctifs, alimenté dans ses excursions fécondes par des giclées d'indus boueuse, d'électro grognarde, de free-jazz famélique.
Le résultat, vous le sentez venir, est inclasssable, passant en quelques minutes d'une solidité rythmique quasi mathématique à une mirifique turbulence anarchique. Add N To (X) fait la nique à Suicide, Cabaret Voltaire cuisine la rate de Trent Reznor avec Uwe Schmidt pendant qu'Artaud les mate en coin en se bouffant les ongles des pieds.
Oui, voilà vous y êtes... Médicaments et folie à tous les étages !
Chroniqué par
Yvan
le 07/04/2014