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Andy Stott

: Luxury Problems



sortie : 2012
label : Modern Love
style : house music disloquée

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Tracklist :
01/ Numb
02/ Lost And Found
03/ Sleepless
04/ Hatch the Plan
05/ Expecting,
06/ Luxury Problems
07 Up The Box
08/ Leaving

La techno d'Andy Stott est une forme désespérément mutante et difficile à domestiquer. Luxury Problems en est une nouvelle illustration. Ce deuxième Lp officiel du Mancunien fait suite à deux Ep en forme de brûlots, Passed Me By et We Stay Togeter, qui maltraitaient la house music jusqu'à l'épuisement de ses formes et du son, jusqu'à traquer le fantôme blafard, nichée au coeur de la bête. Difficile de se défaire de l'évidence d'une formule qui sur ces deux vrais-faux albums était arrivée à matûrité. Mais c'est bien le défi que s'est fixé Andy Stott sur ce nouvel essai. Le producteur britannique a largement bâtit Luxury Problems autours du chant d'Alison Skidmore, la professeur de piano de ses années de jeunesse. Objet de tous les fantasmes, sa voix est le matériel dans lequel il est allé puiser la substance de ses nouveaux titres de danse music en friche. Après les Eps incendiaires de l'an passé, Luxury Problems nous embarque pour une autre expérience limite, avec comme fil d'Ariane, le chant opératique d'Ailson Skidmore, qui prend désormais une place primordiale.

L'album tout entier est hanté par sa présence invisible. Les titres les plus surprenants sont ceux où ses vocalises d'une beauté délitée occupent l'avant scène. En la matière, Numb apparaît comme la plus grande réussite. Andy Stott y exhume quelques trésors dissimulés dans le chant ectoplasmique de sa mezzo-soprano - quelques infimes secondes d'un soupir ou d'un chuchotement qu'une oreille même avisée n'aurait su entendre - et qu'il reinjecte dans une pure dance music spectrale aux relents industriels et à la moiteur étrangement ensorcelante et quasi-incestueuse ! Lost and Found et Hatch The Plan s'enfoncent encore un peu plus dans le trou béant creusé par les sorciers de la Witch House et sonnent presque pop par certains aspects. L'ambiance est plus sépulcrale et le chant ensorcelant de Skidmore se fait un peu plus pénétrant. Malgré tout, les deux titres ne parviennent pas à reproduire le miracle du morceau d'introduction. La voix de la déesse Skidmore n'est pas suffisamment abimée par les traitements du Britannique pour qu'elle laisse suinter la même liqueur ténébreuse et enivrante. Numb demeure la réelle surprise de ce début d'album.

Ailleurs, Andy Stott déroule sans mal la techno en friche, ultra-chaloupée et submersible, qui a fait le succès de ses précédentes production. La poreuse Sleepless s'enfonce dans un bassin d'infra-basse et martèle jusqu'à épuisement ses samples vocaux déformés comme des gimmicks projetés contre un mur d'eau. Expecting malmène encore plus les motifs de la house, et crache un blizzard poisseux et opaque sur des rythmiques indus et disloquées, créant un effet de fausses perspectives auditives des plus efficaces. On reste dans la continuité de Passed Me By et We Stay Together, dans leur auto-célébration même. Seul le titre éponyme parvient vraiment à surprendre. Luxury Problems est même le hit de l'album, un hit total: écartelé premièrement, entre un pointillisme ultra-référencé, hommage à la pure tradition de la house music noire et sensuelle de Chicago, deuxièmement, l'hymne post-pop DIY et spectrale et enfin troisièmement une sorte de pulsion reconduite partout chez Andy Stott qui voudrait confronter les émanations de la dance music actuelle à leur négatif monstrueux.

Seules ombres au tableau? Up The Box et ses beats jungle suscitent une pointe de circonspection. Leaving clôt l'album en singeant les plages angéliques de Julee Cruise ou Julianna Barwick sans convaincre vraiment. Mais sa pochette est déjà mémorable et Luxury Problems a pour lui une poignée de titres qui resteront sans doute des classiques dans la discographie d'Andy Stott.
De tout ce qu'il a produit jusqu'à présent, Luxury Problems est l'oeuvre la plus tortueuse, la plus problématique. Peut-être aussi la plus ambitieuse. La dislocation du son s'accompagne d'une plus grande fragmentation du propos. C'est le propre d'un essai qui se veut franchement aventurier, jusqu'à se perdre dans ses ramifications, jusqu'à rester figé face à sa propre audace. En fait, Luxury Problems déchaine les passions. Après deux albums en forme de manifestes indiscutables, qu'on crie au sacrilège, au suicide artistique ou au génie, Luxury Problems n'en demeure pas moins un moment d'exploration, de prise de risque dans la carrière jusqu'ici sans accroche du Britannique, qui, plus que jamais, refuse l'évidence et cherche à se réinventer.

Chroniqué par Mickael B.
le 20/12/2012

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