La musique électronique a de beaux jours devant elle. Il y a des moments comme ça où on aimerait en être sûr. La croirait-on exsangue, elle ajouterait un épisode supplémentaire au déroulement de son histoire. On la penserait vidée de sa substance, au limite de la catalepsie, elle referait surface, requinquée de nouvelles idées.
Sayem est assurément de ceux qui voit les choses sous cet angle. Optimiste. Meme si son projet
A City Gone Mad..., et l'histoire qu'il y conte l'est beaucoup moins : celle d une ville en phase terminale.
Album concept donc, conçu comme la bande originale d'une bande dessinée en noir et blanc croquée par
Artus, ce Lp est de ces idées originales qui font frais entre les oreilles.
Voilà onze titres, entre électro clash, pop synthétique revêche et ambient psychotrope, qui font étalage des vertus et bontés diverses du sieur
Sayem. Mieux, ils parviennent même à les incarnés : au-delà des dessins d'Artus, la voix perlée de sucre du
Prince Miiaou, le rap burné de
DSL, ou encore le travail de co-production du touche à tout
Flairs, donnent corps à des morceaux qui auraient pu rester coincés dans leur abstraction. Un comble, et ma foi une bonne chose, pour celui qui a rapidement été catalogué comme le chantre d'un abstract hip-hop à la française.
Oui,
Sayem a changé de braquet. Et pour ce faire, il entreprend de ménager la chèvre et le choux, gardant ce goût cinématique qui fit son succès tout en donnant à ses instrus d'autres couleurs, le tout en évitant que l'ensemble de son ouvrage ne tombe à plat. Ce qui en soit n'a rien d'évident.
Résolument moderne, ce disque voit ainsi cohabiter un nombre incalculable de registres musicaux - autant d'ambiances et de vignettes se succédant dans le strip d'Artus - où règnent aussi bien embardées discoïdes, affolements 8 bits, acouphènes folks et onirisme electroniqué. Du coup, ce qui aurait pu virer à la foire d’empoigne fatigante reste efficace et percutant. Parce qu'essentiellement, s'il mélange tout sans complexe et pas mal d'ingéniosité aussi,
Sayem a su rester humble face à son projet, amoureux qu'il apparait, de sa matière.
Rien - instruments, machine, voix, production - n'est utilisé au détriment de la clarté du résultat. Tout est mis au service d'incandescentes compos qui transcendent finalement un concept qui pour tout vous dire, sur le papier, nous avait laissé dubitatif. Une bonne surprise en somme.
Chroniqué par
Yvan
le 16/11/2011