Dans ce disque il y a du violon. D'emblée, ravalez les glaires et les hoquets nauséeux que pourraient susciter chez vous, chers lecteurs sectaires, une telle affirmation. Devant plus à
John Cale qu'à André Rieux, cette association du violoniste
Balthazar Monthanaro-Nagy, du producteur M.A.O.iste chantre de minimalisme,
Tadahiko Yokogawa et du beatmaker
Serge Ortega - les
Redrails donc - délivre un remède imparable contre une pandémie de technicité sans âme, en vogue ces temps-ci. Au contraire, ces virtuoses, chacun dans leur genre, ont trouvé là le juste équilibre entre chaleur organique et froideur numérique, abstraction et vitalité musicale.
Devant un si impressionnant déploiement de forces instrumentales et électroniques, les mots n'en mènent pas large. Pour tout vous dire, à l'heure de gratter ce billet, ils ont plutôt rasé les murs, pour déguerpir en loucedé, laissant place à ces plages sonores de toute beauté. Et oui, au début, n'était plus le verbe, poussé qu'il était à aller voir ailleurs si on y était. Pas de mots, et pourtant quelle poésie dans ces dix titres. Quelle ferveur, quelle grâce. A tomber !
La musique des
Redrails est ainsi faite. Un univers 100 % instrumental, régi par l'absence de règles, tendu de frissons ardents et tapissé de soie. Un monde qui ne se découvre pas comme ça. Mais auquel il serait franchement inapproprié de ne pas essayer de s'adapter, de l'apprivoiser, tant il agit sur l'auditeur-dompteur comme un onguent sur des ecchymoses.
Confectionné sous le haut patronage de
Dominique Poutet aka
Otisto 23, fameux expert en pharmacopée électronique, ce disque réussit l'exploit poétique de croiser les contraires, traditions (les Balkans, l'Orient) et expérimentations électro-acoustiques, dans une union sacrément tangible, à l'énergie salvatrice. Un album lancinant tout en dissonances et fragrances envoûtantes, que l'inspiration et la finesse ne lâchent jamais. Sublime !
Chroniqué par
Yvan
le 18/05/2011