Que devient
Ninja Tune ? Toutes les oreilles étaient autrefois tournées vers le label. La simple évocation de son nom suffisait à faire savoir de quoi l'on parlait. Il y avait même ce
"à la Ninja Tune" qui correspondait à un goût, un style, oscillant quelque part entre l'electro-jazz et l'abstract hip-hop bon enfant. Mais aujourd'hui l'engouement semble avoir fondu comme neige au soleil, l'époque auquel se rattachait ce goût révolue. Alors, comme d'autres maisons qui ont connu semblable perte de vitesse,
Ninja Tune tente de rebondir. L'écurie continue de soutenir ses poulains, mais des portes ont été ouvertes. À des artistes qui, jusque là, ne collaient pas vraiment à l'image que l'on pouvait se faire de la maison londonienne.
Le son qui s'offre aujourd'hui à mes oreilles est, tout comme celui de
Ghislain Poirier il y a deux ans, quelque chose derrière lequel on aurait difficilement deviné le cachet
Ninja Tune.
King Cannibal propose un musique ténébreuse, industrielle. Une musique à mille lieux de la bonhommie naïve qu'affichaient la plupart des productions du label. Si
King Cannibal pioche allègrement dans la drum'n'bass pour la texture de ses compositions, les rythmiques – exception faite d'
Aragami Style – tendent plutôt vers une cadence dubstep. En fait,
King Cannibal choisi généralement un tempo qui l'assied entre les deux scènes : trop lent pour la drum, trop rapide pour le dubstep. Il investit cette niche dans laquelle
Planet Mu a déjà essayé de se creuser une place. On y trouve des artistes comme
Milanese,
Broken Note, ou
Vex'D. Et en parfait produit marketé pour le public de cette niche, on n'a pas oublié, évidemment, d'inviter quelques MCs à poser leur flow.
Jahcoozy écrase désormais
TTC à la place de l'artiste à qui tout le monde veut arracher un featuring. Autre époque, autres mœurs.
King Cannibal surfe sur un courant prometteur. Il possède ce petit grain d'originalité qui apporte ce qu'il faut de caractère à la besogne.
Let The Night Roar est un album réussi, bien produit, mais qui peine peut-être à s'arracher du consensus. Pas la révélation de l'année mais un album à écouter, ne serait-ce que par curiosité.
Chroniqué par
Tehanor
le 01/11/2009