Notre ami
Sasu Ripatti, alias
Vladislav Delay, a décidé de laisser libre cours à sa folie créatrice sur ce nouvel album intitulé
Tummaa. Il faut dire qu’après avoir pondu le fantastique
Whistleblower, courant 2007, le finlandais était attendu au tournant ! Les mauvaises langues diront que lorsqu’on a atteint le sommet de son art, on ne peut ensuite que redescendre de son promontoire. Mais dans le cas présent, c’est sans compter sur les nombreuses ressources cachées du finlandais, qui décide de surprendre tout son petit monde avec ce nouvel album.
L’entrée en matière est d’ailleurs un peu raide.
Ripatti nous avait bien dit qu’il désirait revenir à ses premiers amours musicaux, lorsqu’il était encore batteur de jazz. Et à un son beaucoup plus organique aussi, sans toutefois délaisser complètement l’électronique. Mais il est dur de ne pas être surpris par la machinerie mise en branle sur le premier titre
Melankolia. Comprenez par "machinerie" ce montage de beats mécaniques et de percussions bizarroïdes qui forment le fil rouge de
Tummaa. Viennent s’y ajouter des bruits de tout ordre : chuintements, crissements, grésillements électrostatiques, obtenus souvent à partir d’instruments tout à fait banals mais qu’on pourrait croire, pour le coup, sortis tout droit de la quatrième dimension ! Le titre
Mustelmia, dans le même genre, pourrait être vu cette fois comme une danse rituelle – voire exotique – pour androïdes primitifs en mal de trip mystique.
Le pire, croyez-le ou non, c’est que la sauce prend, même si il faut plusieurs écoutes avant d’apprécier comme il se doit ce
Tummaa si déroutant. Et oui,
Ripatti tisse des climats apaisants et plein de fantaisies, de façon si minimaliste et ludique, qu’il est difficile de ne pas se laisser prendre au jeu, de goûter avec délectation aux mystères de ses compositions.
Le reste de l’album ne dépareille pas, bien au contraire.
Ripatti varie les ambiances avec habileté : on peut citer en particulier le noctambule et urbain
Musta Planeeta, l’extatique
Tummaa ou encore le cosmique et bruitiste
Tunnelivisio. Chose incroyable quand on pense que jamais une seule seconde notre finlandais tombe dans le patchwork imbuvable. A ce titre, il profite notamment de l’aide précieuse d’un camarade de choix :
Craig Armstrong, qui, au fender rhodes ou au piano, finit d’apporter par petites touches un plus indéniable aux compositions de
Vladislav Delay.
Ripatti, en grand maître du bidouillage, a réalisé un véritable travail d’orfèvre sur cet album. Il nous offre un poème lunaire, une symphonie douce/amer et étrange pour quincaillerie et vieux instruments vintages. On a pas fini de se délecter de tous les détails dont recèle
Tummaa. Quelque chose me dit que ça ne fait même que commencer.