En un peu plus d'un an, la chanteuse
PJ Harvey vient de livrer deux nouveaux albums. Après,
White Chalk, cette dernière renouvelle la fructueuse collaboration avec le compositeur John Parish qui œuvra sur
Dance Hall at Louse Point, publié en 1996, et tout particulièrement sur son chef-d’œuvre :
To Bring You My Love.
Un retour aux sources, la sortie de son album
Stories From The City, Stories From The Sea, ayant fait basculer notre chère Polly, d’emblème rock alternatif, acquise dans les années 90, à celle de pin-up arty au début des années 2000. Une situation plus que désagréable. Véritable crise hémorroïdaire, cet album rappelle à chacun que, tôt ou tard, un transit parfait peut toujours et à n’importe quel moment se finir dans la pire des diarrhées. Certes, la chanteuse britannique avait sûrement décidé de changer de registre, vers un rock simpliste peut-être plus à l’image, d’ailleurs, de la réputation de néo Patty Smith, modèle post punk équipé d’un moteur customisé à la nitroglycérine. Si dans
Uh Huh Her,
PJ Harvey a relancé la machine en 2004 en renouant avec un style plus garage, nul doute que cet album, s’il se bonifie avec l’âge, n’en rappellera jamais l’humeur rageuse d’un
Dry,
Rid of Me ou
4 Tracks Demo.
Depuis la publication de
White Chalk, la chanteuse ouvre l'ère d’un folk song passéiste et mystique marqué par sa voix de tête. Un album qui brille par ce côté suranné rappelant, à l’image de la pochette, l’époque victorienne. Une ambiance acoustique ponctuée d’instruments jamais utilisés par la chanteuse : un piano aux accents bastringues, la harpe, le violon, l'harmonica et la cithare que la petite Polly utilise à merveille. Un album qui brille par sa nudité et sa fragilité. Une musique simple et touchante en forme de supplique. Une nouvelle ère dans laquelle la chanteuse a trouvé un vocabulaire capable de marquer en profondeur son auditeur. Tout comme,
To Bring You My Love, et
Is this Desire ? , la présence de John Parish est prégnante, ce dernier ayant repris du service, plus de dix ans après sa dernière collaboration avec la chanteuse. Il est l’artisan de cet album marqué par sa pâte folk tantôt déglingué, tantôt expérimentale, remarquée dans son travail avec
16 Horsepower, Eels, Sparklehorse et Dominique A.
Fort de cette nouvelle collaboration, le duo entre la chanteuse et le producteur a décidé de se reformer dans un parfait d’esprit d’équité,
PJ Harvey écrivant les paroles et John Parish, la musique.
A Woman A Man Walk By propose un alliage entre rock noise voire shoegaze (
Black Hearted love), folk aux accents irlandais (
Sixteen, Fifteen, Forteen), ambiances bancales tirées d’une scène de cirque (
Leaving California) ou déluge rock à la basse proéminente dans l’esprit de la production de l’album
Is this Desire? (
The Chair). L’album surprend par la diversité des d’ambiances proposées. Il réunit à la fois l’acoustique (
The Soldier) et l’électrique (
Pig Will Not), le teigneux (
A Woman A Man Walk By) et le sublime (
April).
A Woman A Man Walk By évoque une autre voix : celle des premiers albums de
Cocorosie, le chant éraillé et faible de
PJ Harvey rappelant étrangement celui des sœurs Cassidy. D’autre part, l'esprit de
Patty Smith est encore plus marqué tant on retrouve les intonations de la chanteuse américaine à la fin de
Sixteen, Fifteen, Forteen. Seule réelle objection,
A Woman A Man Walk By s’essouffle progressivement. La magie du début s'estompe à la fin de cette nouvelle production qui pousse même le vice jusqu’à proposer un patchwork sonore digne du génial
Oslø Telescopic (
A Woman A Man Walk By).
Sans égaler, le précédent album solo de
PJ Harvey, cette très bonne production montre à quel point la présence de John Parish est véritablement nécessaire à la chanteuse, ce dernier s’inscrivant parfaitement dans le rôle de l’homme providentiel.