Quelque trois ans après
leur très belle forme du vent,
La Diagonale Du Fou (malgré la regrettable discrétion qui entoure ses activités) est toujours aussi droite.
Unmodern le prouvera à qui voudra bien l'entendre.
Ce qui marque, ce qui me marque dans
LDDF, c'est — outre ce qu'on a déjà pu dire de
ce qu'ils font au corps—, c'est une manière toute personnelle de jouer contre son image, contre la propre représentation que le groupe donne de lui-même. Cette façon de jouer derrière le mur du son qu'il monte, d'être un groupe d'une subtilité rare, capable de toujours changer tout en restant radicalement le même — ce en quoi, sans doute, il est non-moderne, ce qui ne signifie pas "anti-moderne" — capable de broyer littéralement le son tout en demeurant parfaitement musical (
Rift). Capable de s'étendre en roulements, de frapper fort, si fort, de marteler coup après coup. Et, sans jamais recommencer, d'amener leur idée musicale encore un peu loin (
Trüd).
Continuellement jouer d'une contradiction.
On l'entend à partir du sample qui ouvre
Mimodram : "J'ai trouvé ton revolver et j'ai enlevé les balles. Puisque tu ne veux pas partir, c'est moi qui m'en vais." C'est-à-dire : l'histoire d'amour qui s'achève, que l'un ne veut pas achever, mais qu'elle achèvera quand même. Sans sang (elle enlève les balles). Non sans douleur (elle le quitte). Et de jouer cette fin de l'amour sur un registre puissant, lourd, sans mièvrerie aucune. De mimer le drame, peut-être, mais sans distance. D'être dans le drame, donc. De ne pas prétendre le drame, mais de le vivre. D'en vivre ainsi la violence, l'insoutenable intensité. C'est-à-dire : ne pas faire semblant, mais faire tout simplement.
Tout en mélodies, en haltes, en rebondissements haletants (
Chyma),
Unmodern est un disque qui ne pèche jamais, malgré ses excès. Ils sont parfaits.
Chroniqué par
Jérôme Orsoni
le 27/02/2009