Il faut être honnête — c'est la moindre des choses qu'on puisse faire — ce nouvel album de
Grails n'apporte pas grand-chose par rapport aux précédents. C'est un bon disque. Oui, c'est sûr. C'est un disque largement supérieur à la moyenne. Oui, aussi. Mais, bon, on ne va pas en faire tout un plat. Depuis son tournant psychédélique,
Grails nous a habitués à ce genre de disque. Ici, ce qu'il manque, c'est un peu de nouveauté. Il manque quelque chose qui différencie
Take refuge in clean living. Quelque chose qui le marque du sceau de sa singularité.
Or, ici, rien de nouveau. Simplement une musique déjà entendue, pas tant une reproduction de ce qui a déjà été fait, qu'un développement, toujours dans le même sens. Ce sens, ça s'entend clairement, vaut en lui-même. Il y a des idées, il y a un travail sur la nuance, une manière de se rapporter à une origine musicale, au rock psychédélique des années 1970, une manière de faire éclater les morceaux, d'en rajouter encore et encore, d'ajouter des couches, et d'envahir l'espace sonore sur un mode rythmique après de longues plages presque vides, éthérées, subtiles. Mais, ce sens, par ailleurs, mériterait d'aller voir ailleurs.
Disons qu'il faudrait à
Grails une nouvelle rupture, comme celle qui avait marqué le destin du groupe entre
Redlight (2004) et
Interpretations of three psychedelic songs from around the world (2005). Un nouveau tournant. Ce n'est pas un conseil — on se gardera toujours de donner des conseils aux musiciens qui, de toute façon, font ce qu'ils veulent et, de toute façon, ont bien raison. C'est, plus modestement, une remarque d'auditeur qui, s'il prend du plaisir à l'écoute de ce
Take refuge in clean living, ne ressent plus vraiment ce frisson qui l'a parcouru quand il a entendu le groupe au
festival Rhâââ Lovely en 2006, percevant à ce moment à quel point le groupe avait changé et à quel point ce qu'il proposait avait valeur d'inouï. Aujourd'hui, cette valeur-là semble avoir perdu de sa richesse (et les ajouts de synthétiseurs à la
Pink Floyd et de clavecins très sixties n'y feront rien). Non pas tant en elle-même que rapportée à ce qu'elle rappelle inévitablement.
Chroniqué par
Jérôme Orsoni
le 06/06/2008