S’il a été bâti sur quelques révoltes personnelles, le rock a rapidement été rattrapé par un suprême conformisme pour devenir, tout aussi rapidement, l’une des musiques les plus conventionnelles au monde. Preuves en donnent encore aujourd’hui un bon million de groupes dispersés sur la planète, trentenaires engoncés en jeans slim ou adolescents qui ne savent pas ce qu’ils font quand, déjà, ils ne savent pas comment le jouer.
Mais l’important étant le plaisir du spectateur content d’un rien, il serait grand temps de relativiser, d’arrêter de tenter de communiquer son refus, et d’écouter, satisfait d’être passé entre les gouttes de la propagande commerçant, ce disque de The Idle Suite. Fantasmant ici un Battles qui aurait véritablement réussi son pari, ce groupe néo-zélandais mêle avec élégance post rock, free jazz, no wave et (même) pop, à coups de batterie, guitares, basse et claviers – soit : on l’a échappé belle.
C’est que The Idle Suite joue des contrastes, comme tout le monde, mais son originalité est de le faire avec intelligence : passant d’un rock arythmique et ample (We are the Urns from Undr) à une noisy pop plus mélodique rappelant celle de Field Mice (The A&P Show) ; d’une longue plage monochrome (There is No Such Place) à une déconstruction bruitiste (Sphyma Zygaena). En guise de conclusion, le groupe donne Forcefield, qui installe sur plus de 23 minutes une progression partie des limbes, réminiscence de Badalamenti qui devra faire avec les incursions d’une guitare ayant à voir avec celle de Lee Ranaldo. Brisée, la progression est contrainte de céder la place à une plage atmosphérique moins inquiète, et donc rassurante. D’autant plus que Up Two Stick Road avait déjà prouvé plus tôt qu’existaient encore, dans le rock comme peut être ailleurs, des exceptions qui confirment les règles désolantes et imposées.
Chroniqué par
Grisli
le 01/07/2007