Stones Throw nous gâte ! Après la rétrospective
Ten Years et quelques mois avant le cadeau de Noël suprême (
Liberation, un album gratuit de
Talib Kweli et
Madlib!), le crew de
Peanut Butter Wolf nous livrait cette compilation d'inédits, dvd en prime.
Ce
Chrome Children est en tout point représentatif du label : éclectique, innovant, talentueux et… inégal. Nous y reviendrons plus tard. Stones Throw a le mérite de réconcillier l'Est et l'Ouest (l'axe Detroit-L.A. avec Jaylib par exemple), le hip-hop classique et le déviant, le tout articulé autour de son beatmaker, rappeur et producteur fétiche,
Madlib. Voilà pour la présentation, passons au disque en question…
On commence très fort avec
Oh No, au rap et à la production, sur le mouvant et carribéen
Oh Zone, dense et original en diable avec ses réminiscences de flûte et de steel drum. Puis bienvenue à Motor City, tout le monde tape dans les mains sur le rap lourd de
Guilty Simpson. Arrive ensuite le beat conducta, qui excelle autant dans le hip-bop luxuriant que dans le style minimaliste (comme ici), véritable créateur de textures rappologiques. A la hauteur de nos espérances. Un
Madlib forcément omniprésent, caché sous ses différents pseudos et collaborations. Ici avec
Mf Doom, pour une dose homéopathique de ce qui doit être l'album hip-hop le plus attendu du moment (
Madvillain – Monkey Suite). Là avec l'homme aux trois poumons,
Percee P, sous l'appelation
Quasimoto, voix pitchée et redécoupée comme à l'accoutumée. Plus loin à la production pour
Young Jazz Rebel dans un registre plus jazz-soul.
Mais la musique instrumentale se taille aussi sa part du gâteau. Grâce notamment aux trips seventies de
Koushik ou à l'énigmatique
James Pants qui nous livre un funk halluciné et décoiffant, une des bonnes surprises de la cuvée. De même pour
J.Rocc ou
Young Jazz Rebel, qui s'évadent à grand renfort de batucadas, mélant les genre avec inspiration, à l'image de leur label. Belle mosaïque malheureusement entachée par des pièces plus convenues (
MED – All I Know) ou carrément dispensables. C'est le cas des morceaux posthumes de
J-Dilla, seul ou dans
Jaylib. Car tout conscient qu'on est de la lourde perte artistique que réprésente sa disparition, les morceaux présentés ne sont que de vagues esquisses à peine mixées qui n'ont pas leur place ici. Il aurait sûrement mérité plus bel hommage…
Mais véritable remède à la déception, le dvd est là, présentant des courtes (mais intéressantes) interviews de
Peanut Butter Wolf et
Madlib et surtout retraçant une des soirées Stones Throw, placée sous le signe de
Madvillain, avec un Mf Doom en grande forme, ce qui justifie en lui même l'achat de ce disque. Bref, un décor bariolé, un hymne aux musiques métisses, prenant soin de décloisonner le hip-hop, à l'heure où sa version édulcorée est devenue un banal produit de consommation, qui ne vaut même pas cinquante centimes puisqu'il est dupliqué et téléchargé à l'infini. A ce sujet, on soulignera la démarche exemplaire de Stones Throw, qui semble se préoccuper plus de nos oreilles que de son porte-monnaie, comme le prouve le
Liberation cité plus haut, téléchargeable gratuitement à cette
adresse.
Chroniqué par
Rafiralfiro
le 11/01/2007