Par un curieux réflexe pavlovien, le morceau d’ouverture de ce premier album de
The Blood Arm renvoie instantanément l’auditeur près de vingt ans en arrière : ce piano, tout droit issu des débuts de la house, cette rythmique indolente mais marquée, cette voix qui traîne sur les fins de phrases... Pas de doute, nous sommes chez les
Happy Mondays !
Si cette impression s’estompe sur les titres suivants, il n’en reste pas moins que
The Blood Arm partage plus que ces quelques similitudes avec les mancuniens sous acide : même profondeur dans le propos (« I like all the girls and all the girls like me », clame le refrain-scie de
Suspicious character – ça pourrait être du
Shaun Ryder), même volonté (il est vraie fort répandue ces derniers temps) de traîner le rock sur le dancefloor, même parfum de hype plus ou moins alimentée par le haut partonnage artistique d’une figure tutélaire (
John Cale pour les uns,
Franz Ferdinand pour les autres).
La comparaison s’arrête pourtant là : les
Happy Mondays ont eu le temps d’enregistrer un classique méconnu (
Bummed) avant de cramer leurs fusibles et de livrer des albums semi-ratés ou catastrophiques ; mais de nos jours, hélas, tout va beaucoup plus vite, et
The Blood Arm est donc directement passé à la seconde étape.
Car
Lie Lover Lie , sans être franchement mauvais, manque tout de même singulièrement de fond : pour un ou deux morceaux qui remportent la mise au forceps (l’énergique
The Chasers, digne de
Maxïmo Park, ou le joli crescendo d’
Angela), combien de popsongs à la petite semaine, aux mélodies fadasses, et à l’absence de conviction presque palpable ? Beaucoup trop pour l’auditeur moyen, même indulgent.
Il faut dire que le comble de l’agacement est atteint très tôt dans l’album :
Suspicious character, troisième morceau du disque, déjà cité ci-dessus pour ses qualités littéraires, cristallise à lui seul tout ce que l’on peut reprocher à
The Blood Arm : absence totale de personnalité (on jurerait entendre un morceau de
Franz Ferdinand, l’instinct mélodique en moins, les grosses ficelles en plus), gimmicks faciles tentant simultanément de faire oublier l’absence de mélodie et de marquer les esprits malgré tout (c’est pas simple, mais le refrain-scie évoqué plus haut sert à ça), le tout marketé comme étant le tube imparable de l’hiver. Un hiver que l’on aurait voulu moins tiède et plus rigoureux, tout comme cet album. Très moyen, donc.
Chroniqué par
Bigmouth
le 09/01/2007