Tomas Korber, on en a déjà parlé, construit patiemment une œuvre de premier ordre, par ses propres soins et en s’entourant des grands qui l’ont précédé : ici
Keith Rowe et
Günter Müller. Donc
Fibre, c’est moins l’album de
Korber entouré de deux mentors que l’abum du trio
Korber / Rowe / Müller.
Et ce d’autant plus qu’ils ont travaillé cette fois comme une seule et unique entité, corps tricéphal indivis, deux guitares qu’on entend sur des registres variés, un iPod qui fait office de mini-sampler et bien sûr les ordinateurs dont ne se séparent plus ces musiciens.
Dans leur manière d’approcher ce genre très spécifique qu’est l’hybride électronica
machines / guitares (on parle aussi de
guitar-based environment), les trois jouent la carte d’une musique ligne claire : épuration du propos, transparence du jeu, minceur de la couche sonore en dépit de sa complexité et de sa sophistication auditive – on est à l’opposé, dans le même genre, de ce que faisait
Keith Fullerton Whitman avec
Twenty-Two Minutes for Electric Guitar, coulée de lave électrique, épaisse, gluante, incandescente. Ici au contraire, c’est la micro-mélodie qui prime, deux notes s’assemblant dans ce qui pourrait être un fragment de thème (le centre du troisième morceau est ainsi). Il y a comme une manière de se tenir hors de l’émotionnalité brute que peut rechercher l’ambient ou l’électronica quand elles s’accompagnent d’instruments électriques : le trio ici s’en tient à la fibre sonore, et la tresse avec une intelligence et un art en tous points estimables.
Chroniqué par
Mathias
le 10/07/2006