Quelle chance d’être un indie kid en 2006 ! Tes idoles s’appellent
Animal Collective,
Liars ou
Gang Gang Dance, tes albums de chevet
Sung Tongs,
God’s Money et
Drum’s not dead. Tu déniches tes groupes préférés sur Myspace, parfois ce sont des jeunes à peine plus âgés que toi, et qui comme toi, ne jurent que par les groupes déjà cités. Que la vie est bien faite.
La genèse de
Our Brother The Native a tout de la belle histoire inventée par l’attaché de presse zélé. Deux gamins du Michigan se rencontrent sur les bancs de l’école, se découvrent des goûts musicaux en commun, se mettent à faire de la musique ensemble et à s’enregistrer. Bientôt, un troisième larron les rejoint. Qu’importe la distance physique (plusieurs milliers de kms les séparent), la magie des télécommunications modernes fera le reste. Les morceaux se construisent ainsi patiemment, via échanges de mails, par additions successives. Un jour, la team de Fat Cat découvre par chance quelques morceaux du futur album sur Myspace, la musique leur plaît, emballé c’est signé.
La musique gorgée d’effets de
Tooth and Claw, nourrie de touches vocales souvent improbables (la maman d’un des bambins, a même été conviée au chant à deux reprises), de motifs répétitifs à la guitare, au piano, au banjo, de percussions délurées ou plus discrètes, est tramée de samples divers et de sons concrets retraités, ou issus d’expérimentations sur des jouets d’enfants, rappelant ainsi souvent les bricolo girls de
Cocorosie.
On adhère sans réticence à ces morceaux de space folk suspensif et dilatoire aux structures lâches fourmillant de sonorités que n’épuisent pas les écoutes successives. Et si l’on navigue souvent à vue dans une mer de chausses-trapes sonores, ce qui n’est pas désagréable, certaines plages moins tarabiscotées nous permettent de faire escale au sein d’une douceur mélodique folk planante des plus appréciables :
Apodiformes et
Falconiformes, très cocorosien. Les réussites les plus probantes du disque étant certainement
Strigiformes et ses harmonies vocales infectieuses, ou encore la mélancolie toute retorse de
Tilia Petiolaris.
Moins sauvage et tribal que
Gang Gang Dance, moins « pop » que
Animal Collective, mais assurément alimenté d’une écoute passionnée de ces groupes qui renouvellent le folk moderne,
Tooth and Claw propose sa vision, certes référencée et encore juvénile, mais non dénuée de fulgurantes audaces, de la musique neo folk actuelle.
Ce premier album des bambins biberonnés aux musiques electronica-folk déviantes est donc un premier jet réellement convaincant . Certes il faudra tuer le père pour avancer et affirmer une singularité peut-être encore un peu timide (l’ombre d’
Animal Collective plane massivement sur le disque), mais ce premier album n’est de leur avis même, qu’une première étape déjà dépassée. On est donc d’autant plus pressé de découvrir la suite.
Sinon, puisqu’on parle de jeunes prodiges américains, si vous avez des nouvelles de
Khonnor…
Chroniqué par
Imogen
le 26/06/2006