Is that a Riot ?, c’est bien la question qu’il va falloir se poser à l’écoute de ce quatrième opus du
Youngblood Brass Band, opus (et groupe) tonitruant(s) s’il en est. Ecouter le
Youngblood Brass Band, c’est un peu comme entendre
Lester Bowie et ses Brass Fantasies reprendre ici
Nirvana (
Smells Like Teen Spirit), là les
Spices Girls (
Two Become One) : une sorte d’étonnement, de surprise à constater un croisement contre nature ; d’abord on n’y croit pas, et puis on se rend à l’évidence, l’idée n’était pas si mauvaise, même plutôt bonne.
Donc le
Youngblood Brass Band, riot jazz comme ils le disent eux-même, est un croisement de hip-hop, de funk, de jazz, de punk, et de régularité rythmique chère aux fanfares et autres marching bands. Pas punk jazz au sens de
Jaco Pastorius (encore que...), funk sans que l’on puisse repérer des codes funk à l’intérieur de sa musique, le
Youngblood Brass Band a son originalité dans l’idée de riot jazz : jazz d’émeute, soit une manière de contourner l’impératif martial des marching band pour le tirer vers son cousin négatif, l’émeute, la révolution (elle suppose un ordre interne militaire, mais seulement pour accoucher d’un désordre, politique cette fois).
Et de fait,
Is that a Riot ? apparaît comme le chaînon manquant entre le punk et le free-(jazz) ; du moins, il crée ou dessine une filiation entre deux genres opposés que rapproche la même insoumission : sur
March, les cuivres atteignent à des points de dissonnance qui viennent dissoudre les thèmes si patiemment repris et contrepointés, sur
Bone Refinery, ne reste que quelques pulsation basses de tubas, une rythmique économe et un flow justicier. On pense alors à cette note anodine (mais qui dit tout) à l’intérieur de la pochette : « l’album à été enregistré dans une chambre à l’aide de cuivres, de micros et d’une voix » (ajoutons à cette liste le laptop à tout faire, utilisé comme studio et non comme instrument électronique). Retour au plein cœur du
Do It Yourself!, pour un opus qui concentre la hargne de trois décennies au moins : le free des sixties, le punk des seventies, le hip-hop des eighties. De quoi engager quelques grands bonds en avant.
Chroniqué par
Mathias
le 13/06/2006