Ils seront peu nombreux, les musiciens qui nous feront le coup de bluff que réalise
Fovea Hex avec
Bloom. Une ambient vocale qui se veut avant tout chansons, où l’instrumentalité s’efface presque entièrement dans la transparence, dans l’oubli. Ou plutôt, parce que la musique est construite de manière telle qu’elle appelle par la suite à être oubliée, au profit du seul souvenir des voix.
Jeu dangereux, que joue
Fovea Hex en faisant de l’oubli une dimension même de sa musique et qui risque de la condamner à l’insignifiance : que faire d’une musique qu’on oublie, quand bien même il est de son projet d’être oubliée ? La singularité du projet, la subtilité de ses termes (la musique n’est ni son, ni silence, elle est le silence de la mémoire, l’absence de souvenir, autrement dit elle réside dans le seul présent de l’écoute, pas ailleurs) sera, pour une fois, ce qui condamnera le projet à l’échec (on pourra dire, aussi, que celui-ci faisait partie du projet).
Soyons bien d’accord : il ne s’agit pas de simplement condamner une musique qui serait, au premier degré, insignifiante et vouée à l’oubli. Il s’agit plutôt de signaler et de repérer en quoi le projet, aussi beau soit-il sur le papier, échoue et ce malgré la présence aux côtés de
Clodagh Simonds, la tête du projet, de
Brian et
Roger Eno,
Andrew McKenzie de
The Hafler Trio,
Carter Burwell,
Toby Arnott,
Lydia Sass,
Cora Venus Lunny et
Laura Sheeran : tout un ensemble de pointures de l’ambient et de vocalistes patentés.
Bizarrement, on pense alors, pour expliquer l’échec (car il faut bien une raison), à une supériorité de la pop comme genre musical et comme contraire de ce disque : la capacité à faire prise au souvenir, à la mémoire, à intégrer et se loger au cœur de nos vies dans ce qu’elles ont de singulier malgré leur insignifiance, ou plutôt à occuper la singularité de leur insignifiance. Une musique qui aide à respirer, en somme, et c’est à cela que renonce sciemment
Fovea Hex.
Chroniqué par
Mathias
le 21/04/2006