Premier volet de sa trilogie dont le dernier acte (
Change Ringing), salué dans nos colonnes pour sa beauté et son intelligence, s’est joué sur Cut fin 2005,
Pure Gaze est à la limite moins un premier acte qu’une œuvre programmatique ou une ouverture d’opéra, tant semble contenu tout ce qui sera en jeu dans les deux autres parties, contenue aussi l’origine de l’œuvre.
C’est dans
Pure Gaze qu’
Olivia Block définit les bases de son travail à venir sur la trame, et les interactions de celle-ci avec l’acousticité. La trame, c’est-à-dire le patient réseau de sons tissés les uns aux autres, aussi dense et serré que les œuvres des grands maîtres de la musique répétitive américaine dont
Olivia Block a manifestement reçu l’héritage.
Interactions, pour une fois le terme sera approprié : l’électronique et les instruments (à vent pour la plupart) s’entrelacent, effectuent des permutations, des combinaisons, des inversions, toute une batterie de mouvements relatifs qui fait de la pièce un vaste mobile où le déplacement de chaque point influe sur le mouvement de tous les autres.
Ouverture opératique dans la mesure où, tout au long de son déroulement,
Pure Gaze ménage une dramaturgie sonore qui sera celle de toute la trilogie : s’ouvrant sur des textures sonores sans mélodies ni harmonies et sur des field recordings, la pièce passe lentement de l’électronique aux cuivres, de la trame à l’acousticité, dans une sorte d’éclosion d’une matière sonore plus ample.
Pure Gaze vaut donc doublement, comme premier pan d’une trilogie belle, importante et unique à la croisée de l’électronica et de la musique contemporaine d’une part, comme œuvre intelligente et d’un raffinement à la fois sensuel et érudit d’autre part.
Chroniqué par
Mathias
le 20/03/2006
