Fomenté depuis plus d’une dizaine d’années par
Joe McPhee,
Raymond Boni,
Daunik Lazro et
Claude Tchamitchian,
Next to You a profité d’un récent passage en studio du quartette pour paraître enfin sur disque. Fruit d’accointances régulières, l’enregistrement traîne son improvisation sur une grille à respecter, dont les musiciens n’ont même plus à s’entretenir au préalable.
Ouvert au rythme des impulsions fracassantes, le disque prône avant toute chose la conduite batailleuse, succession rapide des accords de guitare de
Boni, contrebasse menée par l’archet insatiable de
Tchamitchian, et spirales avalant l’alto de
Lazro. Sorte de compromis entre un free jazz sans bornes et le post-punk new-yorkais des années 1980 (
Folie dure). Provoquant la rupture, la contrebasse instigue un passage en brumes apaisant, dissipé bientôt par les interventions extatiques du guitariste et les emportements hautains du saxophone de
Lazro (
The Last Border).
McPhee, lui, se démarque véritablement sur
Next to You, y fabriquant au son de sa trompette de poche des électrons rythmiquement indépendants, quand
Boni tisse des redondances liant les propositions de l’entier quartette.
Jouant des delays, il prescrit aussi des résonances métalliques sur des pièces de cordes percussives (
One More Step) ou travaille un zen poli tant et si bien qu’il finit par grincer (
Softitude). Ailleurs, c’est au duo des vents de tout rafler, le soprano de
McPhee accompagnant l’alto furieux de
Lazro (
Straight Knife), avant de laisser place nette aux parties instaurées et défendues à 4.
Other Warriors, d’abord, impressionnante de densité.
Le règne du calamar géant, surtout, que les musiciens appellent depuis le début, où saxophone et contrebasse évoluent sur les constructions métalliques élevées par la guitare. De l’amalgame obtenu s’échappent des ondes sombres et pénétrantes, d’une intensité enveloppant les domaines de l’improvisation, du free savant et des musiques nouvelles. Comme partout sur le disque, mais sous une forme exacerbée. Voilà pourquoi
Le règne du calamar géant sonne avec emphase l’heure de la conclusion.
Chroniqué par
Grisli
le 25/01/2006