Sous le nom de
Foxes Fox, un quartette occasionnel, mené par le saxophoniste
Evan Parker, s’est récemment réuni dans l’intention de marquer en musique les derniers coups portés en Angleterre par le batteur
Louis Moholo. C’est qu’il fallait à celui-ci retrouver son pays, l’Afrique du Sud, quittée jadis pour cause d’Apartheid.
27 octobre 2004, au Gateway Studio de Londres, sans la moindre introduction, le groupe s’acharne à faire éclater les perturbations, rue dans les brancards, au son des rebonds aériens et des roulements affables de
Moholo. Une coupe nette, et le batteur distribue les coups profonds sur tom basse, quand
John Edwards tend sa contrebasse d’attaques courtes suggérant bientôt la reprise des hostilités. Après avoir ingénument défendu une phrase répétée jusqu’à ne plus pouvoir la retenir,
Parker s’engage avec
Steve Beresford dans un inextricable dialogue saxophone / piano. Frôlant l’anthologie, il pourrait résumer à lui seul l’essentiel de la fougue ici déployée si soustraire un seul geste de la somme fantasque qu’est
Naan Tso n’était pas illusoire. Après une demi-heure, l’improvisation se termine dans les grincements divers et les boucles de cordes pincées.
D’inspiration plus légère,
Slightly Foxed débute par les impacts sauvegardés des doigts d’
Edwards sur son instrument.
Beresford n’intervenant pas,
Parker gagne encore en présence, et distribue comme il l’entend ses phrases grâce au soutien de
Moholo, discret mais immanquable. Infaillible, toujours et encore, sur
Reinecke Gefettet, sur lequel le quartette reconstitué dresse une composition sur l’instant, grave et emportée. Où
Beresford, pas revenu pour rien, badinera à loisir sur un piano réverbéré, jusqu’au chaos grandiose.
Ne restait plus, pour l’équilibre de
Foxes Fox, qu’à
Edwards de revendiquer mieux. Omniprésent sur
Renard pâle,
Parker n’en permet pas moins au contrebassiste d’arriver à ses fins : attaquant à grands coups d’archet le bas de son instrument, il tisse un accompagnement insatiable et libérateur, décidant d’une pause à partager, avant d’inviter
Moholo à le rejoindre le temps d’un duo dense et concis. La session close sonne l’heure de l’au revoir. Et toutes les boîtes du monde de souhaiter un jour organiser un semblable pot de départ.
Chroniqué par
Grisli
le 22/12/2005