Cela faisait longtemps qu’un album de house ne nous avait pas autant retourné le cerveau. Musique charnelle s’il en est, cet opus signé
Richard Davis fait la part belle aux vocaux, omniprésents, distille des fulgurances pop avec maestria et parfait le tout sur un pied délicieusement redondant et addictif. Redoutable.
Après avoir collaboré et tourné avec
Swayzak pour leur dernier album,
Loops from the bergerie, l’anglais expatrié à Berlin sort les violons et mélange danse et mélancolie dans un élan délesté de toute fausse pudeur. C’est en prenant son temps que
Davis a conçu cet album, suite d’un
Safety sorti en 2002 annonciateur de la merveille à venir. Ici, pas de cut-up à tout-va ni d’expérimentations digitales, juste une utilisation efficace et maligne de recettes ayant fait leur preuve, une rencontre heureuse entre house débridée et downtempo cotonneux vous faisant à chaque fois hésiter entre le mode contemplatif, rêverie extatique et un mode plus actif, déhanchement lascif au milieu du salon. La force de cet album est là, dans cette capacité à susciter des réactions ambivalentes, entre intimité plaintive (
Details) et attaque frontale (
Bring me closer).
Basses rondes caressant les sens, lyrics susurrés, voix ténue d’où s’échappe une incomparable mélancolie, nappes exquises où BPM et sensualité se toisent et se complètent,
Richard Davis s’autorise autant de digressions (l’ambiance très cinématique de
Others) que de références assumées aux poncifs du genre (
This time) en ayant toujours soin d’y imprimer sa marque : une tristesse abyssale, insondable, dont l’expression se jouerait via un langage du corps ainsi transcendé par le beat. La musique comme catharsis aux peurs ou angoisses humaines, le dancefloor comme dernier refuge psychanalytique, tous unis dans une célébration élégiaque de la vie et ses turpitudes inhérentes.
Gardez les paupières closes, jamais vous n’aurez autant aimé pleurer en dansant …
Chroniqué par
Oropher
le 26/10/2005