Dès sa couverture hybride,
Falling Feather dévoile les ambiances – les climats plutôt – dans lesquelles évolue la musique de
Burd Early. En haut, une texture épaisse de peinture figure les nuages, présentant un dégradé des diverses tonalités du bleu. En dessous, naïvement dessiné au crayon noir, un petit bonhomme accroché à un immense parapluie remplace le « l » du patronyme du musicien. Entre deux, quelques bulles et taches qui auraient coulé de ces nuages étalés symbolisent l’orage qui menace. L’averse couve, pesant sur l’atmosphère, mais devrait miraculeusement accoucher de plumes, si l’on en croit le titre du disque.
La pluie règne pourtant en maîtresse discrète sur les 5 titres qui composent
Falling Feather. Elle naît de la batterie de Jim White – membre du trio australien
Dirty Three – venu prêter main forte à
Burd Early. Tout en subtilité, il traverse l’arrière-boutique de ces chansons de saison, distribuant quelques coups brefs et arythmiques au hasard de la caisse claire et du métal qui la cercle. Le décor est planté, idéal pour que prenne corps et se dilue le songwriting d’
Early. C’est une mélancolie en dégradé qui domine ici, sans jamais céder pourtant aux facilités de la noirceur trop prononcée ou de la plainte lancinante. Non, les chansons de
Burd Early se délitent entre calme et douceur, quand la voix du monsieur évoque un
Andrew Bird un peu plus rauque, la gravité plus apparente. De l’orgue Hammond atmosphérique de
Baby be au violon vibrant de
Self disperseal, en passant par une pedal steel countrysante sur
Two hands ou une boucle de guitare propre à hypnotiser sur
Night on the flower, la musique de
Burd Early se promène entre country, blues et folk, héritière d’une tristesse contemplative, jamais désespérée. Quelque part à l'intérieur des territoires explorés par
Songs :Ohia, pour qui il ouvrait lors de la tournée 2003. Lentes et habitées, ces compositions parviennent à faire naître l’émotion sans tirer sur la corde, proposant une palette subtil d’un état d’âme automnal, habité, voire hanté quand la voix se mue en une brume légère(
Self disperseal).
Avec ce nouvel EP, Acuarela se profile comme l’un des labels actuels les plus excitants, naviguant dans les diverses contrées du rock et de la pop. Quant à
Burd Early, cette courte livraison (à peine 20 minutes au compteur) suffit à esquisser les contours d’un songwriting racé, idéal pour l’automne qui débute. Cinq titres pluvieux, légers pourtant, réalisant parfaitement la démonstration de ces chutes de plumes annoncées. Un disque pour les matins gris à venir, touchant de justesse et de retenue.
Chroniqué par
Christophe
le 08/10/2005