"
Akufen meets
Parliament". C'est ainsi que
Trevor Jackson décrit la musique de
Chok Rock, dernière signature française de Warp Records. La suite, en quelque sorte, du mot de
Derrick May pour expliquer la techno : "
Georgle Clinton et
Kraftwerk coincés dans un ascenseur, avec un séquenceur pour seule compagnie". En tout cas, de quoi alimenter le buzz, même si nos indics-trainspotters ne manquent pas de signaler que ce
Big City Loser Ep est en fait une réédition d'un 12" paru sur Châteaurouge, augmentée d'un morceau. Et il faut le reconnaitre : il y aussi peu de raisons d'être surexcité par cette sortie que de crier au scandale.
Parce que
Chok Rock n'est pas vraiment porteur d'un son nouveau et/ou sensationnel. Il suffit d'écouter les douze minutes de
Give it up : une rythmique mène la danse, inflexible comme
Florian Schneider, et autour d'elle s'articulent sample de basse, microsample de guitare funk, hook vocal saturé, etc. Difficile de ne pas penser à
Ark versant
Alleluyark, dans ce tempo remuant où le rush attendu et espéré n'arrive jamais. Ici, la science du groove est aussi indéniable, le producteur joue beaucoup sur les cuts et les pauses dans un ingénieux crescendo, mais la formule ne tient pas toutes ses promesses : le sound design est très abouti mais très propre, et il manque la fantaisie foutraco-ludique pour réellement apprécier à la maison - nulle doute que l'effet sera différent sur un dancefloor. La seule relative surprise vient de l'outro downbeat, qui sonne comme une phase de déconstruction du track.
Les titres suivants poursuivent plutôt dans ce sens, le rythme devient domestique.
Buzz porte bien son titre, les sons bourdonnent ; il y a là encore une vraie intelligence de production, la linéarité du titre est sans cesse déjouée par l'agitation d'effets distordant les samples et de micropauses. Tout cela anime un groove, ajoute à la dynamique créee par des samples attrayants (interjections d'une voix sensuelle, gratte et basse funk, gimmick syllabique à la
Prefuse 73).
On regrette toutefois qu'en dépit d'un fond funk, l'ensemble reste très dans un froid entre-deux, presque impersonnel, et qui va peut-être aux dépens de l'immédiateté. Les mélodies sont là, pourtant, on le sent, on le sait, on les découvre à l'écoute approfondie, telles qu'exposées sur ce break où une sorte de
Jamie Lidell bionique glisse ce keyword plaisant de "big city loser", et nous suggère qu'une écriture subtile et une certaine ironie peuvent se cacher là derrière...
Moins technique,
Take A Plane est serti de guitare acoustique et convoque force réminiscences pop électronique (
Air,
Royksopp…), développant enfin une atmosphère en plus de l'esthétique de production. C’est dans l’attente de cet équilibre entre sound design avancé des textures et charme des compositions qu’on va dorénavant guetter le nom de
Chok Rock.
Chroniqué par
Guillaume
le 05/05/2005